#28 | Lorsque la moto soufflait le chaud et le froid de l’Histoire |

En 1973, la Fédération internationale de motocyclisme (FIM) crée une nouvelle formule dans le cadre de ses championnats du monde : le Trophée FIM 750 (1973-1974) devenu Championnat d’Europe 750 (1975-1976) puis Championnat du monde 750 jusqu’à son terme en 1979. Mais le Circuit de Montagne d’Auvergne avec son important public espère que le choix d’une épreuve française sur ce site confirmera le succès de l’année précédente : près de 80.000 spectateurs avaient assisté au Grand Prix de France à travers les autres catégories (125, 250, 350, 500 et side-cars). Que nenni ! Les 26 et 27 mai 1973 marqueront un tournant majeur dans l’avenir de Charade. Et catalysera le besoin de plus de sécurité sur les circuits.

 

Entre silences pesants, colère et huées, ce public est exposé au régime de la douche écossaise laborieusement géré par le Moto Club d’Auvergne (MCA) organisateur, la FFM et la gendarmerie. En tête d’affiche, pourtant, les 750 FIM : un plateau de toute beauté avec des bécanes inédites et de nombreuses marques (Honda, Kawasaki, Suzuki, Yamaha/350, Harley-Davidson, Ducati, Moto Guzzi, BSA, Norton, Triumph, Yamsel). Côté pilotes, du beau monde également : des vedettes du Continental Circus (Barry Sheene, John Dodds, Werner Pfirter, Gianfranco Bonera, etc.) accompagnés d’Anglais comme John Cooper ou Peter Williams fidèles de leurs « petits » circuits britanniques. Et de nombreux Français « inter » : Christian Bourgeois, Christian Léon, Eric Offenstadt ou Michel Rougerie. Parmi ces derniers, les trois premiers soulèvent la contestation dès le samedi. En cause, trop de glissières coupe-gorge indispensables aux autos. Et donc, pas assez de bottes de paille pour protéger les pilotes moto. Si la contestation s’appuie sur ce point de sécurité, la confusion et les retards se propageront tout le week-end avec menaces et sanctions des autorités. Pour cause, une semaine plus tôt, ces champions perdaient deux des leurs à Monza (Jarno Saarinen et Renzo Pasolini). Présents dans le public de Charade lors de ces deux journées insolites, nous nous souviendrons longtemps d’une ambiance crispante que la victoire et le fairplay de Barry Sheene, futur vainqueur du championnat 750 cette année-là, auront difficilement effacée. Le Riomois Michel Garnier terminera 9e et 1er Français sur une Moto Guzzi. Les autres séries inscrites (250 Inter, Trophées motocyclismes Coupe Kawasaki, Critérium sports 750, side-cars) auront souffert de cette ambiance.

 

Onze mois plus tôt, la piste du circuit de Charade s’était déjà « illustrée » par ses bas-côtés instables dont les projections de gravillons provoquèrent une dizaine de crevaisons lors du Grand Prix de France de Formule 1. Au 9e tour, le pilote autrichien Helmut Marko (BRM) perdait un œil, une semaine après sa victoire aux 24 Heures du Mans sur Porsche 917 K et des années avant de devenir l’une des éminences grises de Red Bull F1 et sa filière de jeunes pilotes. L’année 1974 permettra cependant au toboggan auvergnat de briller à nouveau en accueillant deux compétitions exceptionnelles : le dernier GP de France moto couru ici, devant plus de 100.000 spectateurs, avec les duels Agostini/Read et une manche du Championnat d’Europe des sport-prototypes 2 Litres agrémentée de moult batailles de marques et de pilotes. Charade au sommet de sa notoriété dérangerait-il les autres circuits français ? Certains le pensent. Mais ne peuvent éclipser un facteur sécurité devenu incontournable. En temps d’incertitude, tous les coups sont permis.

 

Guy Lemaître/Agissons pour Charade (Texte & photo)

Notre photo : Le pilote-ingénieur anglais Peter Williams, 3e du Prix FIM 750 en 1973 à Charade, et sa belle JPS Norton préparée par ses soins.

#27 | Le paddock dans tous ses états ! |

Lové au cœur des bâtiments et de la piste, le paddock du circuit de Charade en a vu de toutes les couleurs. En cause, la diversité géologique de ce terrain proche de trois hectares au relief initial accidenté. Qui plus est, une ligne de partage résulte du ruisseau l’Artière venant de Manson. Ce dernier reçoit au célèbre Petit Pont son affluent rive droite le modeste Beaupriant venant de Thèdes sous le virage Rosier. De part et d’autre de ces tranchées aquatiques, le sous-sol complexe recèle maintes sources dont une importante d’eau ferrugineuse. La coupe est pleine !

 

Abondance de biens ne nuit pas. Mais lorsqu’il s’agit d’eau, on patauge souvent dans l’inconnu. Propriétaire du site, le Département du Puy-de-Dôme peut en témoigner. La construction de la piste, 4 comme 8 km, a partout rencontré cette eau, parfois ses truites ou écrevisses, devenant un casse-tête pour les ingénieurs de l’Equipement. Au début des années 90, un projet de petit étang avait même été imaginé sur le ruisseau à l’amont du Petit Pont alors que les eaux de ruissellement menaçaient de déborder sur la piste ! En 2020, à l’extérieur du dégagement du virage de ce même célèbre Petit Pont, un bassin d’orage de quelques dizaines de mètres carrés a été réalisé.

 

Puis les engins de terrassement ont eu raison de ce terrain difficile à maîtriser. Le paddock se divise aujourd’hui en trois zones à différents niveaux. Si, dans les années 60 et 70, les Grands Prix F1, F2, moto et autres courses internationales ont connu cette aire d’accueil peu confortable pour les teams et leurs mécaniciens (notre photo : Trophées d’Europe prototypes 2 Litres en 1973), la lente métamorphose a enregistré d’énormes progrès. Mauvaises herbes et pouzzolane se sont effacées pour un revêtement de qualité doté d’une signalétique au sol. Et nécessite un entretien permanent. Bornes de recharge électrique et branchements divers complètent les équipements nécessaires ainsi que les ateliers. En 1997, à l’entrée du Rosier, un tunnel sous la piste permettait d’accéder au tertre et au village de Thèdes. Un second favorise l’accès au paddock à partir de l’accueil du site. Plus modeste, un troisième en surplomb du Petit Pont n’a jamais trouvé son chemin…

 

En six décennies, cet espace vital du temple auvergnat des sports mécaniques a vu défiler plusieurs générations de bolides. Il a même complété la piste et les tertres naturels pour deux manches du championnat du Monde de trial thermique (2002 et 2021) et deux éditions du Supermotard (1990 et 1991). Les années 2005 et quelques suivantes ont accueilli un bivouac de motards de Cambouis et Compagnie dans le cadre de son Classic Circus. Au même moment, l’extension de ce paddock bénéficiait d’un important tonnage de tout-venant extrait du chantier du tramway clermontois. L’été 2018 a vu débarquer les gentlemen drivers anglais avec leurs F1 des années 60 du Trophée HGPCA lors de l’Historic Tour : une ambiance « so british » entre les courses autour de l’Union Jack! Les 18 et 19 octobre 2019, le premier E-Festival donne le ton avec l’émergence des énergies nouvelles pour la mobilité. Sans le savoir, cette fête préfigurait l’arrivée du groupe GCK aux commandes du circuit.

 

Hors compétitions, le paddock de Charade accueille l’AFMA (Auvergne Formation Moniteur Automobile) qui prépare les moniteurs de pilotage en sport auto. Depuis 2013, chaque premier dimanche matin du mois, d’avril à octobre, Charade Classic rassemble des centaines de passionnés d’autos et motos de collection. Le dimanche 21 mai 2023, en marge de la piste, cette superbe arène accueillera de nombreuses animations et expositions de véhicules de course à l’occasion du deuxième Charade Super Show : les Jacky Ickx, Giacomo Agostini et autre Henri Pescarolo, vedettes de cette journée d’exception, se souviendront-ils du paddock « sauvage » qu’ils ont connu lors de leurs exploits sur piste entrés dans l’Histoire un demi-siècle plus tôt ?
Guy Lemaître/Agissons pour Charade

#26 | Grand « 8 » et super descente : émotions garanties ! |

Une légende se bâtit sur des événements, des hommes et un contexte. En autorisant les bolides et bécanes de course anciennes pour des parades sur le grand tracé de 8,055 km à l’occasion du deuxième Charade Super Show, le matin du dimanche 21 mai 2023, c’est un flot de souvenirs qui jaillit dans l’esprit de nombreux passionnés.

 

Entre chutes, collisions et tôle froissée, la descente de Gravenoire reste un parcours du combattant pour bon nombre de ceux qui, professionnels ou amateurs locaux, ont testé leur courage dans cet enchaînement de virages exceptionnels, souvent aveugles du Circuit de Montagne d’Auvergne. Que ce soit Chris Amon, en 1972, au volant de sa Matra MS 120D ou Giacomo Agostini, en 1974, sur sa Yamaha 500, les records du tour de l’ancien tracé (jusqu’en 1988) ont été gravés définitivement dans le marbre par de grands champions : 2’53’’9 en course (moyenne : 166,751 km/h), 2’53’’4 aux essais pour la Formule 1 du Néozélandais ! ; 3’32’’4 en course pour la moto de l’Italien (moyenne : 136,525 km/h). Quant aux anonymes auvergnats qui se « jaugeaient » le week-end ou la nuit sur cette route départementale, théâtre d’exploits des pros, les gamelles étaient plus nombreuses que les chronos ! Descente aux enfers pour circuit diabolique serait-on tenté de dire…

 

Sur notre cliché, deux barquettes se suivent dans les « Jumeaux » au cœur de la descente de Gravenoire. Entre falaise volcanique et ravin surplombant Royat et Clermont-Ferrand, les essais vont bon train à l’occasion des « 300 kilomètres d’Auvergne », manche du Championnat d’Europe des sport-protos 2 Litres dominé en 1973 par les Lola T292 et Chevron B21 & 23. A Charade, lors de la course du dimanche 17 juin, l’Anglais Guy Edwards l’emportera devant ses deux compatriotes Chris Craft et John Burton. Le Français Gérard Larrousse bat le record du tour pour la catégorie avec un temps de 3’07’’5 (moyenne : 154,656 km/h) sur une LolaT292.

 

Guy Lemaître/Agissons pour Charade

#25 | Tour Auto : la piste aux étoiles ! |

Ils attendent son passage depuis 2020 ! Les passionnés du Tour Auto ont rendez-vous avec lui le jeudi 20 avril au matin dans le paddock ou en bord de piste du circuit de Charade. La nuit précédente, les voitures auront stationné à la Grande Halle d’Auvergne, Clermont-Ferrand étant ville-étape de cette édition 2023 qui, du 17 au 22 avril, mène de Paris à Cannes.

 

Les 238 autos (1950-1982) – ou ce qu’il en restera !- arriveront par l’accueil du circuit pour attendre dans le paddock avant de prendre la piste. Un détail qui se compare avec ce qui se passait dans les années du « 8 km ». En effet, les bolides « débarquaient » par la petite route de Thèdes dont l’accès au circuit n’était qu’une formalité. Chaque concurrent se positionnait ensuite sur la grille de départ.

 

De nombreux faits d’armes marquent l’étape de Charade (26 fois réalisée !). On se souvient de duels ou cavaliers seuls qui ont vu s’exprimer des As du volant. En 1958, acteur du premier passage sur le « circuit de montagne d’Auvergne » de la grande histoire du Tour de France automobile, Olivier Gendebien s’illustre sur sa Ferrari 250 GT. En septembre 1970, Jean-Pierre Beltoise et Henri Pescarolo assurent le doublé sur leurs Matra MS650. En 1971, Jean-Pierre Jabouille « mettait » plus d’une minute aux deux Matra de Gérard Larrousse et Bernard Fiorentino. Il pilotait la merveilleuse Ferrari 512 M jaune de l’Escuderia Montjuich. Cette année, il est possible que l’on revoit ce proto 5L taillé pour l’Endurance (ou une réplique ?) entre les mains de Mr John of B (#251). Deux ans après, les deux Ligier JS2 aux couleurs BP dominent face aux Porsche 911 et Lancia Stratos: Gérard Larrousse gagne, Guy Chasseuil casse. Le premier récidive en 1974.

 

Un grand bond en avant nous conduit sur le « petit » Charade de 4 km dans les années 2000. On y retrouve un « ancien », acrobate de la piste : « Jeannot » Ragnotti avait brillé en monoplace Renault, en Proto 2Litres (March) ou en Production (R5Turbo) sur le toboggan auvergnat de la période 1975/1985. Il réapparaît à plusieurs reprises au Tour Auto (Lissac puis Optic 2000), version contemporaine de 2000 km de ce rallye exceptionnel. Dans le siège baquet de sa berlinette Alpine A110 blanche et rouge aux couleurs La Mondiale, il assurait encore le spectacle face à son ami Alain Serpaggi sur Alpine Renault 1800 jaune et à une meute de Porsche.

 

En 2023, les concurrents prestigieux de la catégorie Compétition ont pour noms Thierry Boutsen, ancien pilote belge de F1, sur Shelby Cobra 289 (#201) ou Henri Pescarolo (Shelby Cobra #215) face aux Ford GT40, Jaguar Type E ou Porsche 911. Pour l’anecdote, la voiture #1 (catégorie Régularité) est une Renault 4CV de 1950 pilotée par le tandem médiatique François Allain/Dominique Chapatte. Le 3e journaliste connu, Grégory Galiffi, conduira une BMW 3.0 CSL (#71).

 

Guy Lemaître/Agissons pour Charade (texte & photos)

#24 | Jacky Ickx : le retour du jeune prodige… un demi-siècle plus tard ! |

69, 70, 72 : ces chiffres résument les années des trois derniers Grands Prix de France de Formule 1 ayant eu pour cadre le Circuit de montagne d’Auvergne. Autrement dit notre cher circuit de Charade. Mais ils correspondent aussi aux trois seules présences du Belge Jacky Ickx sur le tourniquet auvergnat. Voici, dans le détail, ces faits d’armes : 

  • 1969 : 4e aux essais ; 3e en course (BrabhamBT26 Ford#11), derrière Jackie Stewart (Matra Ford MS80#2) et Jean-Pierre Beltoise (Matra Ford MS80#7). On retiendra son incroyable duel avec Beltoise, chouchou des Français, pendant la deuxième partie de la course. A l’arrivée, une demi-longueur de voiture seulement sépare les deux protagonistes qui ont régalé le public : Beltoise, héros national, devance Ickx, audacieux qui ne lâche rien. En fin de saison, le Belge devient le dauphin de Stewart au classement du championnat du monde. A Charade, sur sa combinaison, son prénom s’écrivait « Jackie » comme pour les pilotes anglais… 
  • 1970 : 1er aux essais (Ferrari 312 B #10) devant… Jean-Pierre Beltoise (Matra MS120#21) ! Le public espère retrouver ce duel au sommet. Il en sera tout autrement. Après 15 tours roue dans roue, Beltoise se retrouve seul en tête. Ickx abandonne au 16e. Et Beltoise crève au 26e ! Le pilote belge termine encore 2e au championnat derrière Jochen Rindt à titre posthume. 
  • 1972 : 4e aux essais (Ferrari 312B2#3 puis #3T/mulet en course)  derrière Chris Amon (Matra), Denis Hulme (McLaren) et  Jackie Stewart (Tyrrell) ; 11e en course à un tour. Il  termine 4e au championnat du monde derrière Fittipaldi, Stewart et Hulme. 

 

Jacky Ickx affiche huit victoires et 25 podiums en 114 GP de Formule 1 entre 1967 et 1979. Six victoires et trois 2es places aux 24 Heures du Mans couronnent un beau parcours en Endurance. « Monsieur le Mans » brillera par son intelligence au volant mais également grâce à sa lucidité en matière de sécurité. Pour preuve, en 1969, première participation au Mans : dernier parti ayant pris le temps d’attacher son harnais dans sa Ford GT40 pour montrer l’inconscience de ceux qui profitaient de ces fameux départs en épis pour prendre de l’avance.  A l’arrivée, grâce à une aspiration calculée, il termine 1er (associé à Jackie Oliver) moins de 100 m devant la Porsche 908 d’Herrmann/Larrousse ! L’année suivante, ce type de départ, jugé à hauts risques, sera interdit définitivement. Ickx se distingue aussi  en CanAm et en rallye-raid (Dakar). 

 

2023 marque l’année du grand retour à Charade de Jacky Ickx (78 ans). Dimanche 21 mai, il sera le parrain de la 2e édition du Charade Super Show avec parades matinales exceptionnellement sur le long tracé de huit kilomètres de ses exploits.  

 

Guy Lemaître/Agissons pour Charade 

circuit de charade

#23 | Long comme… une belle histoire |

8,055 km. Un numéro de code ? Non. Pas plus une distance olympique ou celle entre deux localités. Mais la longueur d’un ruban d’asphalte qui, en ce dimanche inaugural du 27 juillet 1958, fut présenté au public comme le « Circuit de montagne d’Auvergne ». Situé à un jet de pierre de Clermont-Ferrand au milieu des premiers contreforts de la Chaîne des Puys, ce qui deviendra vite le circuit de Charade (nom du village – dépendant de Royat – le plus proche de la piste) commence très tôt à se faire un nom. D’abord dans le milieu de la compétition automobile puis, rapidement, dans celui de la moto. Et, enfin, dans le cœur d’une génération de Clermontois qui, les week-ends, prennent plaisir à fréquenter cette piste devenue célèbre et ouverte à la circulation.

51 virages forment ce chapelet qui serpente à une altitude moyenne de 800 mètres. Certains s’impriment rapidement dans l’esprit des pilotes. Ils ont pour nom : après le départ et une côte de 600 m, la courbe de Manson qui prépare à la descente de Gravenoire, frissons garantis, une fois le col de Charade franchi. Arrivent au galop le Belvédère (Grand balcon), les Jumeaux, la Carrière puis l’incroyable banking à hauteur de la route de Royat… les gaz à fond. C’est ensuite le début de la remontée, Clermont et Boisséjour-Ceyrat à gauche dans le vide, les falaises volcaniques du Puy de Gravenoire à droite. Pas le temps de souffler. Champeaux donne le ton d’un final mouvementé. Le « S » de la Ferme et la descente vers le Petit Pont précèdent une courte côte et l’épingle Marlboro. Puis déboulent Thèdes, son pif-paf, sa courbe, sa descente. Enfin, le Rosier permet aux intrépides quelques prouesses ultimes et appréciées du public avant de franchir la ligne d’arrivée.

De 1959 à 1974, Charade accueille la F1 à travers quatre Grands Prix  et les championnats du monde de moto avec dix Grands Prix de France ainsi qu’un Grand Prix FIM 750. Et un public énorme ! Entre ces dates, se faufilent les Trophées d’Auvergne (Prototypes, GT, formules de promotion monoplaces ou de tourisme), des courses de moto « inter » ainsi que le passage du Tour de France automobile.

Postes de secours, commissaires de piste et autres responsables du contrôle sportif, de la billetterie  ou du chronométrage constituent une communauté de plusieurs dizaines d’officiels. Tous restent fidèles de ces rendez-vous orchestrés par l’Association sportive de l’Automobile club d’Auvergne (ASACA) à l’origine du circuit ou le Moto Club d’Auvergne (MCA).

1989 met un terme à cette période d’activité du grand tracé avec ses 4 passerelles. Le petit circuit fermé lui succède : 3.975 mètres, 18 virages. Dimanche matin 21 mai 2023, le « 8 km » sera exceptionnellement ouvert aux bolides à l’occasion de la deuxième édition du Charade Super Show. Parmi eux, quelques champions du passé, afin d’écrire un nouveau chapitre de cette belle histoire.

Guy Lemaître/Agissons pour Charade (texte et photo)

#22 | Le roi Ago de retour en terre Arverne |

Il a signé ! Giacomo Agostini, le campionissimo, latin lover et gueule d’ange auteur de trois podiums lors de trois Grands Prix moto courus à Charade sera de nouveau en selle le dimanche 21 mai à l’occasion du Charade Super Show. Qui plus est, sa prestation concernera aussi bien l’ancien circuit de 8,055 km que le tracé actuel, pour des parades et démonstrations. MV Agusta 500 trois cylindres (4 temps) ou Yamaha TY (2 temps) ? Le suspense demeure. Mais retrouver Ago dans la descente de Gravenoire, dans le virage du Petit Pont ou au sein du paddock mérite de réserver cette date.

Derrière son éternel sourire charmeur, c’est avant tout un fin pilote et metteur au point. On se souvient de son dernier week-end de course à Charade en avril 1974. A l’intersaison, il venait de quitter sa fidèle marque italienne MV Agusta et le son exceptionnel de ses moteurs 4 temps pour découvrir les moteurs 2 temps du constructeur japonais Yamaha. Un geste fort quand on connaissait son attachement à la première. Une semaine avant le Grand Prix de France, il gagnait la classique américaine, les 200 Miles de Daytona, en Floride, sur sa nouvelle monture, une 750 japonaise et devant une majorité de pilotes américains très fiers. Cet exploit fut unanimement reconnu alors que beaucoup prédisaient qu’il ne s’adapterait pas à cette nouvelle motorisation. Auréolé de ce succès outre-Atlantique, il livrera deux superbes duels aux essais à l’Anglais Phil Read qui l’avait rejoint chez MV la saison précédente. Devant plus de 100.000 spectateurs, Giacomo emportera la catégorie 350 cc et cassera en 500, non sans avoir signé le record du tour moto définitif de l’ancien tracé (3’32’’4 à 136,525 km/h).

Ses passages à Charade au GP de France : 2e (MV) derrière Mike Hailwood (Honda) en 350cc en 1966 ; 4e (MV) en 350cc et 1er en 500cc en 1972 ; 1er (Yamaha) en 350cc et abandon en 500cc, en 1974. En 2018, au guidon d’une MV 500 3 cylindres, Ago est l’invité vedette du plateau moto de la première édition de Charade Heroes qui commémorait, cette année-là, le 60e anniversaire de l’inauguration du grand circuit.

Le palmarès d’Ago est inégalé. Il comporte 15 titres de champion du monde entre 1963 et 1977 (sept en 350cc et huit en 500cc) soient 123 victoires et 159 podiums en Grand Prix ; dix victoires au Tourist Trophy (GB) et d’autres à des classiques (Daytona, Imola, etc).

Guy Lemaître / Agissons pour Charade (texte et photos)

#21 | Jean-Pierre Jabouille, le « Grand blond » fidèle du bleu France |

Metteur au point autant que pilote, Jean-Pierre Jabouille* s’est autant illustré par la qualité de son travail que par son attachement aux marques françaises emblématiques des années 70 et 80.

Longiligne était sa silhouette, rectiligne aura été son parcours professionnel dans le sport automobile. Jean-Pierre Jabouille faisait partie de ces pilotes auto dont la France était fière deux décennies durant. Mais celui qui a été rebaptisé « le Grand blond » a longtemps prouvé sa confiance dans la production nationale. A commencer par Renault, Alpine et Matra. Puis Peugeot et Ligier.

On retiendra en priorité ses années Formule 1. Entre 1975 et 1980, au service de Tyrrell, Renault puis Ligier, il participe à 55 Grands Prix qui se soldent par six pole positions et deux victoires (France 1979, à Dijon, où son talent est couronné par la première victoire d’un moteur turbo, qui plus est français avec Renault, en F1 ; et Autriche 1980). Cette même saison, il se blesse les deux jambes au GP du Canada. Cependant, son excellent travail technique valorise la polyvalence du pilote.

En effet, depuis ses débuts en 1966 dans la Coupe R8 Gordini, le Grand blond passera d’une discipline du sport automobile à une autre avec la même passion. Mais avec des bonheurs différents. Monoplace F3 (vice-champion de France 1968 derrière François Cevert), puis F2 (champion d’Europe en 1976 sur Alpine) ; Endurance avec 13 participations aux 24 Heures du Mans dont quatre fois 3e, notamment à travers l’épopée Matra Simca puis celle d’Alpine Renault. En 1993, il remplace Jean Todt à la tête de Peugeot Sport. On le retrouvera sur Lada au Dakar 1984 avec Michel Sardou.

Les années Charade commencent en 1966 avec une participation à la Coupe R8G lors des Trophées d’Auvergne. Puis en 1967, 1971 et 1972 sur Alpine Renault en F3. En septembre 1971, l’étape de Charade du Tour de France automobile le voit mettre plus d’une minute aux deux Matra 660 de Larrousse et Fiorentino ! Il pilote à ce moment-là la superbe Ferrari 512 M jaune (#142) de l’Escuderia Montjuich, un proto 5 Litres concurrent du Championnat du Monde d’Endurance, qui terminera 2e du Tour de France automobile avec le pilote espagnol José Juncadella.

Ce seront ensuite les deux manches (1973 et 1974) du Championnat d’Europe des prototypes 2 Litres sur Alpine Renault A440 (#14)  puis A441 (#1) où la chance, ces jours-là, malgré d’excellents temps aux essais, n’était pas au rendez-vous. Le public auvergnat aura l’occasion de revoir Jean-Pierre Jabouille dans les années 1980 sur Peugeot 505 puis début des années 1990 BMW M3 lors des  courses de Production et de SuperTourisme.

On notera enfin son amitié avec Jacques Laffite, son beau-frère, qui a aussi été mécanicien/R8G en 1966 et coéquipier de Jabouille chez Ligier en 1980. Ces deux Parisiens se retrouvaient régulièrement en Creuse, département voisin du Puy-de-Dôme où ils ont des attaches.

(*) Décédé le 2 févier 2023 à l’âge de 80 ans

Guy Lemaître/Agissons pour Charade (texte et photo)

#20 | Tours de piste très attendus pour le Tour Auto |

Depuis sa naissance en 1958, le circuit de Charade accueille régulièrement le passage annuel du Tour de Fance automobile, épreuve internationale créée en 1899 par l’Automobile Club de France. Après une éclipse de six ans (1986-1991), cette compétition reviendra sous le nom de Tour de France automobile historique organisée par Peter Auto, avant de devenir Tour Auto. Depuis 2009, elle est devenue le Tour Auto Optic 2000. Elle associe parcours de liaison, épreuves spéciales sur route et courses en circuit.

 

En cette douce journée du samedi 15 septembre 1973, la 18e édition fait étape à Charade avec son lot de vedettes. En première ligne, Claude Ballot-Léna place à la corde sa Porsche 911 Carrera (Groupe 4) aux couleurs psychédéliques. A ses côtés, en tête du Tour, l’Italien Sandro Munari est prêt avec sa superbe Lancia Stratos HF (Groupe 5TA). Si, sur la grille, tous deux sont devant les deux Ligier JS2 jaunes et vertes BP, c’est Gérard Larrousse sur une de ces deux voitures françaises fabriquées en Auvergne qui gagnera la course devant Ballot-Léna. Mais, au classement final du Tour, Munari emportera l’épreuve. Cette même saison, il deviendra champion d’Europe des rallyes puis décrochera le titre mondial en 1977.

 

Depuis 2020, les nombreux passionnés attendent le retour du Tour! Ils pourront se régaler le jeudi 20 avril 2023 en matinée avec la présence de près de 230 voitures engagées (ayant participé entre 1951 et 1973 plus quelques modèles d’exception) parmi lesquelles les incontournables Ford GT40, Jaguar Type E, Shelby Cobra et autres Ferrari et Porsche. D’autant que la nuit précédente, Clermont-Ferrand sera la deuxième ville-étape.

Guy Lemaître / Agissons pour Charade

#19 | Briefing d’avant-course : une autre époque |

En 1975, alors que beaucoup pensaient retrouver les F1 sur le circuit auvergnat, ce qui ne se reproduira plus jamais après les quatre Grand Prix qui s’y sont déroulés entre 1965 et 1972, les Trophées d’Auvergne ont occupé le week-end des 20, 21 & 22 juin. Cinq courses figuraient au programme dont celle de la Coupe nationale Renault ELF Gordini. Pour trois ans, les R5 LS kitées remplaçaient les R12 lesquelles, pendant quatre saisons, avaient succédé aux cinq années des mythiques R8.

Avant le départ, pour chaque épreuve inscrite au programme, le Directeur de course rassemblait sur la grille tous les pilotes afin de rappeler les mesures de sécurité propres au circuit et à la compétition. Ce briefing permettait au public des tribunes et alentours de voir ces champions du volant avant qu’ils ne s’expriment sur la piste.

Si elle n’est plus pratiquée aujourd’hui sous cette forme sur les circuits, cette initiative avait une certaine saveur. Elle faisait monter la pression ambiante, tant auprès des acteurs que des spectateurs. Une sorte de prologue à un scénario de film voué à la course automobile.

Pour la petite histoire, la voiture #4 au premier plan est celle du vainqueur de Charade, Jean-Luc Rancon, qui gagnera également la coupe cette année-là.

Guy Lemaître / Agissons pour Charade (texte et photo)

#18 | Circuit de montagne… le bien nommé ! |

Les années 70 et 80 ont connu un important engouement pour les courses de côte sur route. Charade n’a pas échappé à cette vague de sport mécanique individuel accessible aux petits budgets sur de courtes distances.
Sur son circuit qu’elle avait créé en 1958, l’ASACA (Association sportive de l’Automobile club d’Auvergne) se lance dans l’aventure d’une telle organisation en avril 1970 : la course de côte automobile de Manson était sur les rails ! Malheureusement, le jour J, à plus de 800 mètres d’altitude, une neige tardive a créé la panique et précipité l’annulation devenue évidente. Qu’à cela ne tienne ! Un an après, on prend les mêmes et on recommence. Le parcours proche de trois kilomètres (il oscillera entre 2,8 et 4 km) démarre à la passerelle de Champeaux pour se terminer devant les tribunes. Une cinquantaine d’engagés de différents groupes de catégories resteront attachés à ce rendez-vous qui ouvrait la saison sur le circuit. Dans l’attente du départ en solo, chaque concurrent empruntait la route de raccordement reliant Manson / Charade à Champeaux.
Les premières éditions se succèdent attirant un public qui se fidélise à cette épreuve sur le théâtre des Grands Prix F1 et moto qui s’y sont déroulés à 15 reprises. Au-delà des voitures de Tourisme, Grand Tourisme et autres monoplaces, on y rencontre des prototypes de constructeurs sans patente. C’est l’éclosion de talents originaux et de réussites mécaniques plus ou moins abouties : 4CV et Dauphines protos, barquettes en tous genres, etc. Des pilotes se distinguent et se font un nom au plan régional en proto ou monoplace : Gérard Bouche, Serge Vidal, Jean-Marie Jung, etc. Dans cette épreuve, ils peuvent se frotter à des leaders nationaux et inter de la discipline comme Jimmy Mieusset, Marcel Tarrès ou Christian Debias.
Une autre association locale, le Clermont Racing présidé par le garagiste pilote Roland Charrière, va assurer les éditions de 1981 à 1988 en y incluant une série Camions. L’aventure de la course de côte auto de Manson connaîtra un terme avec les années 90.
Pour sa part, en 1985 et 1986, le Moto Club d’Auvergne (MCA) met sur pied une manifestation semblable pour quelque 70 motos et side-cars. Son nom : course de côte de Thèdes.  Au début des années 2010, Auvergne Moto Sport, héritier du MCA, propose une épreuve non chronométrée, du départ jusqu’au col de la nouvelle portion. Pour raison technique (sécurité / public), elle n’aura pas lieu…
Plus récemment, à deux reprises, le Club Porsche Auvergne a organisé une montée à but caritatif pour le Lions Club sur la descente de Gravenoire de l’ancien tracé de 8 km, prise à contresens.
Le circuit de montagne d’Auvergne n’a pas tout écrit sur ses côtes les plus célèbres…
Guy Lemaître / Agissons pour Charade

#17 | Une « godasse de plomb » sur le tourniquet des volcans |

Belle rencontre en ce dimanche 6 novembre 2022 au salon Epoqu’Auto à Lyon. Très tôt surnommé « Godasse de plomb » en raison de son audace au volant, le pilote français Jean-Pierre Jarier (76 ans) a couru à Charade, sur les deux tracés de 8 km et 3,9 km, c’est à dire avant et après 1989.
Eclectique comme bon nombre de pilotes de sa génération pouvaient l’être, le Parisien a participé à 134 Grands Prix de Formule 1, de 1971 à 1983. Ces années se sont traduites par trois pole positions, trois meilleurs tours en course et trois podiums. Durant cette période, Jarier a été accueilli au sein des teams March, Shadow, Tyrrell, ATS, Lotus, Osella et Ligier. En parallèle, il prendra également le volant de F2 (champion d’Europe en 1973 sur March) et F3. Ainsi, en juillet 1972, en lever de rideau du 4e et dernier Grand Prix de France de F1 couru à Charade, Jean-Pierre Jarier terminera 5e de la course des Formule 3 sur une March 713.
Les prototypes Matra Simca, Alpine Renault, Alfa Romeo et Renault Mirage (3 Litres), en Endurance et Ferrari (7 Litres) dans le challenge américain Can-Am font aussi partie des voitures prestigieuses qu’il a conduites. Sur Matra, il fut associé à Jean-Pierre Beltoise avec lequel il a remporté plusieurs courses, notamment en 1974. En 1998 et 1999, il termine premier du Championnat de France FFSA GT sur Porsche après avoir remporté d’importantes courses internationales dans cette catégorie des GT (Spa-Francorchamps en 1993 et Suzuka en 1994).
Ses autres passages à Charade sont surtout liés aux Tourisme et Super Tourisme (Chevrolet Camaro en championnat Production 1984 et 1985) et Grand Tourisme (Porsche 911 en 1991/8e; 1995, 1996 et 1997 où il termine deuxième à chaque fois, et 1998 qu’il gagne), à l’occasion des Trophées d’Auvergne avec le championnat de France GT ou le Trophée Carrera Cup.
Guy Lemaître / Agissons pour Charade (texte et photo)

#16 | La vie secrète du Petit Pont |

Virage mythique du circuit de Charade, celui du Petit Pont a toujours été le théâtre de duels d’anthologie et de freinages intempestifs. Dès 1989, sa physionomie a évolué avec les exigences de sécurité. Ainsi l’extension de l’aire de dégagement s’est traduite par l’apport de gravillons et autres matériaux susceptibles de freiner les bolides sortis de piste. Les glissières ont remplacé grillages et poteaux en PVC. Mais, qui dit Petit Pont dit aussi rivière à franchir. A ce niveau, le ruisseau l’Artière provient de la confluence de deux bras : l’un venant de Manson et l’autre de Thèdes via le virage Rosier et le paddock.
Ce petit réseau hydrographique proche des sources offre deux intérêts majeurs : il assure le bon écoulement naturel du cours d’eau qui va ensuite traverser l’agglomération clermontoise ; il abrite une faune aquatique de qualité (truites fario et écrevisses à pattes blanches avec leurs zones de reproduction). Très tôt, des pêcheurs fréquentant ce cours d’eau jusque dans les années 80 ont alerté les pouvoirs publics afin de préserver ce site traversé par 1.200 mètres de ruisseaux.
Cette attention particulière s’est traduite par une convention « pêche » cosignée le 4 octobre 2000 par le président du Conseil général du Puy-de-Dôme et le président de l’AAPPMA La Tiretaine (association agréée pour la pêche et la protection du milieu aquatique), de Royat. Cette dernière, devenue AAPPMA des Quatre sources, veille aussi sur ce même ruisseau en dehors du circuit. Elle poursuit l’esprit de ce texte législatif à travers une réserve de pêche (pêche interdite) où est privilégiée la préservation du cours d’eau : éviter les déversements nocifs, vérifier le bon fonctionnement des avaloirs, des buses souterraines sous le Petit Pont, entretenir la ripisylve et la stabilité des berges, inventorier les espèces sauvages par pêches électriques (inoffensives !), avec la Fédération départementale de pêche, etc. en accord avec le Département et l’exploitant du circuit.
La vie peut ainsi continuer harmonieusement, sur et sous le légendaire Petit Pont…
circuit de charade

#15 | Vic Elford: un géant éclectique |

Vic Elford, monstre sacré du sport automobile décédé en ce début d’année, symbolisait l’archétype du pilote automobile polyvalent : chaque week-end, une grande partie de l’année, le champion britannique découvrait une nouvelle équipe, changeait de volant, de discipline et d’horizon.

Un jour la F1, un autre le rallye, puis les prototypes comme les Porsche 917 en Endurance, la Can-Am, le Transam ou le rallye-cross. Il était réputé pour ses qualités au volant : audace, persévérance et, surtout, adaptation à de nouveaux modèles que d’autres se refusaient de conduire. Exemple, en 1970, l’incroyable Canadian American Challenge Cup Series (Can-Am), championnat qui se déroulait sur une dizaine de circuits d’Amérique du Nord. On y rencontrait des voitures de course innovantes et surpuissantes et un règlement qui se résumait à une philosophie : sans limites ! Vic s’y est illustré à travers trois marques entre 1970 et 1974 : McLaren, Chaparral (l’incroyable 2J à effet de sol et turbine) et Shadow. L’histoire retiendra également qu’Elford aura fait découvrir les qualités de la Porsche 911 en gagnant le rallye de Monte-Carlo en 1968.

#14 | Tour Auto: la rencontre des Légendes |

En cette fin septembre 1971, l’avant-dernière étape (Vichy-Uriage) du Tour de France automobile serait presque passée inaperçue. La vie économique et scolaire a déjà repris. Se rendre au circuit un après-midi de semaine n’est plus vraiment d’actualité. Et pourtant ! Emmené par trois prototypes du Mans dont les deux Matra 650 d’usine pilotées par Gérard Larrousse et Bernard Fiorentino, le plateau mérite le détour. Un concert de V12 en perspective avec les Matra et Ferrari !
Certainement la plus belle, la Ferrari 512 M (châssis 1002 parmi 25 construits en 1970, moteur 5 litres) arbore le numéro 142 dans sa livrée jaune et filets verts de l’Escuderia Montjuich. Pilotée par Jean-Pierre Jabouille, elle va « tourner » autour des Matra grâce à ses 620 cv, en leur mettant plus d’une minute à l’arrivée de la spéciale de Charade. Associé à l’Espagnol José Juncadella et à Jean-Claude Guénard, le Français permet à sa belle de Maranello de donner des frissons aux spectateurs auvergnats. En 2014, Jabouille avait affiché son intention de participer avec elle au Charade Revival projeté par l’association Agissons pour Charade.
Ce modèle a eu une histoire insolite. Construite à partir de la 512 S, cette évolution a eu pour mission de contrer la suprématie des « monstres » de Stuttgart, les Porsche 917, en Endurance notamment aux 24 Heures du Mans. Au début des années 1970, elle participera également au Challenge Intersérie, version européenne de la CanAm américaine. Son meilleur palmarès n’affiche que deux 2e places : en 1970 aux 1000 Km de Paris et en 1971 au Tour Auto.
Dans les années 2000, avec le Tour Auto (historique) organisé par Patrick Peter, ce châssis connaîtra plusieurs propriétaires gentlemen drivers (l’Allemand Dieter Roschmann, le Britannique Robert Horne, le Brésilien Carlos Monteverde). Contrairement à l’originale qui n’en n’avait qu’un sur le toit, les héritières de la 1002 portaient deux rétroviseurs sur les ailes.
En 2016, elle se retrouvera verbalisée pour mauvais stationnement alors qu’elle était garée au pied du siège de la maison de vente aux enchères de voitures de collection Fiskens, dans le quartier de Kensington, au coeur de Londres. Ce qui fera l’objet de plusieurs articles teintés d’humour dans la chronique des faits divers…
Si on la rencontre aujourd’hui dans quelques courses historiques comme Le Mans Classic, il ne s’agirait que d’une réplique (1002 R) afin de préserver le modèle original devenu hors de prix.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade (texte & photo)

#13 | Côté spectacle, la Coupe est pleine avec les « Gordoche » |

Cinq ans seulement ! La Coupe nationale R8 Gordini aura cependant gravé dans les mémoires les exploits de ses toutes jeunes petites berlines bleues Renault de 1100 cc ainsi que de leurs pilotes casse-cou: un exercice de haute volée faisant du circuit de Charade le terrain idéal. Les moyennes en course flirtaient avec les 110 km/h. Portière contre portière, pare-choc contre pare-choc, tout était permis !
Que ce soit dans le cadre des Trophées d’Auvergne (1966 & 1967) en lever de rideau des Protos, du Grand Prix de France de Formule 1 (1969 & 1970) ou lors de la Coupe des Volcans (1969 & 1970/2 séries chaque année), de futurs grands noms du volant se sont illustrés dans cette formule de promotion : Michel Leclère, Jean-Claude Andruet, Alain Cudini, Gérard Larrousse, Jean-Pierre Jabouille et Jean-Pierre Jarier.
Un « local », le Clermontois Roland Charrière, fidèle à Renault et Alpine, a terminé 7e en 1966.
A partir de 1971, la R12 Gordini aura éprouvé beaucoup de temps et de difficultés à faire oublier les bouillonnantes « Gordoche » (ou « Gorde ») à moteur et traction arrière.
Charade et les R8 Gordini : c’est un peu le mariage du Bleu d’Auvergne avec le bleu France …
Guy Lemaître/Agissons pour Charade (photo Automobile Club)

#12 | L’histoire d’amour avec la moto continue |

Quelques mois après la naissance du Circuit de Montagne d’Auvergne en 1958, les responsables du Moto Club d’Auvergne (MCA) ont affiché leur intention d’organiser des courses sur ce merveilleux ruban de huit kilomètres aux portes de Clermont-Ferrand. Ce qui s’est vite traduit par la mise en place, de 1959 à 1964, du Grand Prix de France comptant pour les championnats du monde. John Surtees, avant de passer à la Formule 1, et Jim Redman y ont particulièrement brillé.
Motos et side-cars sont ensuite revenus en 1966 et 1967 élevant au rang de « héros de Charade » l’Anglais Mike Hailwood sur sa fameuse Honda 250cc (notre photo). Le son inimitable de cette six cylindres venue du Japon donnait les frissons aux spectateurs, de Thèdes à la descente de Gravenoire lors des changements de rapports. On ne reverra qu’une fois « Mike the bike » : en 1970, au volant d’une Surtees, lors du 3e et avant-dernier GP de France de F1 à Charade.
Puis vinrent les années fastes « Giacomo Agostini » (1972 & 74) lequel, en 350 et 500cc, au guidon d’une MV Agusta puis d’une Yamaha emballait le public lors de ses duels avec Phil Read (GB) sur le même type de bécane. 80.000 spectateurs pour l’une, plus de 100.000 pour la seconde ! 1970, 71 & 73, des courses inter, dont la nouvelle catégorie 750cc, ont permis d’apprécier d’autres champions comme Barry Sheene (GB) sur Suzuki, et son sourire charmeur flanqué d’une cigarette au bec. Les pilotes auvergnats se sont également illustrés sur leurs terres.
Le dimanche 21 août 2022, Auvergne Moto Sport perpétue l’Histoire avec les roulages de Charade Moto Rétro. Près de 200 motos et side-cars de course des années 60/70 y sont attendus avec des animations.
Guy Lemaître / Agissons pour Charade

#11 | Anniversaire du circuit |

Sa réalisation aura duré 15 mois. Mais deux années ont été nécessaires pour que tractations, démarches administratives et travaux donnent naissance au circuit de montagne d’Auvergne. Le dimanche 27 juillet 1958, son inauguration couronne l’amitié et la complémentarité de deux Auvergnats passionnés d’automobile : Jean Auchatraire (Automobile Club d’Auvergne) et le pilote Louis Rosier. Le second disparaît malheureusement en 1956, non sans avoir laissé son empreinte ce qui permet au premier d’aller jusqu’au bout de leur rêve commun. Un Champenois, Raymond Roche (circuit de Reims), apporte une expertise précieuse à cette naissance. La piste toute neuve de huit kilomètres serpente sur les hauteurs de Clermont-Ferrand, accusant un important dénivelé. Charade, qui ne portait pas encore officiellement ce nom, entrait ainsi dans la cour des plus sélectifs circuits de montagne. Deux courses au programme: les Grand Tourisme (GT) à l’occasion des Trois heures d’Auvergne (40 voitures sur la grille pour un départ type Le Mans ! ) et les Formule 2. Elles auront respectivement pour vainqueurs Innes Ireland (GB) sur Lotus MK11, et le Français Maurice Trintignant sur Cooper Climax. Gerbes aux vainqueurs et concert de louanges pour tous.

La Légende était sur orbite. Guy Lemaître / Agissons pour Charade

#10 | La consécration mondiale est en route ! |

Dimanche 27 juin 1965, avec 17 monoplaces de 1500cc (cylindrée utilisée pour la dernière saison!) au départ, le premier Grand Prix de France de Formule 1 couru à Charade, portait alors le nom de Grand Prix de France de l’Automobile Club de France (ACF). Et un grand champion devait l’emporter au volant de sa Lotus 33R11 numéro 6: l’écossais Jim Clark, au premier plan à droite sur la photo. Il terminera devant son compatriote Jackie Stewart sur BRM 2617, à 26 secondes, futur vainqueur du GP de France sur ce circuit en 1969 et 1972, et l’Anglais John Surtees sur Ferrari. Ce dernier s’était illustré à moto à plusieurs reprises sur le géant auvergnat. Que du beau monde pour un circuit de légende !
Guy Lemaître/Agissons pour Charade

#9 | De l’électricité dans l’air… du temps |

En 2021, Charade accueillait pour la première fois une manche de la toute jeune coupe du monde de E-Bike des VTT électriques. Une manière pour le groupe GCK, nouvel exploitant du circuit, de montrer deux des facettes majeures de l’exploitation nouvelle qu’il envisage pour ce site: développer les énergies plus respectueuses de l’environnement pour la mobilité de demain (électricité, hydrogène) et occuper les magnifiques espaces verts de cette propriété de 82 hectares. En résumé, du mollet et des électrons pour une compétition sportive qui se pratique aussi bien sur le bitume que dans les sous-bois. La deuxième édition de ces E-Bike Series se déroulera le samedi 23 juillet 2022.

#8 | Mini-monstres pour circuit de géants |

Le Grand Prix Camions s’est depuis longtemps installé comme le point d’orgue de la saison sportive sur le circuit de Charade. Le championnat de France de la spécialité qui s’est tenu le week-end dernier au circuit de Charade séduit un public très large : des routiers passionnés jusqu’aux adeptes de ces monstres de 1.100 cv, toutes les générations se retrouvent lors de ces exhibitions à l’Américaine. En 2021, un intermède original a permis à des modèles réduits radiocommandés de prendre la piste entre le virage Rosier et la courbe de Thèdes. Leurs pilotes de tous âges étaient très fiers d’accompagner sur le circuit leurs « jouets », poste de télécommande en mains, entre deux séances de course de leurs aînés devant un public de connaisseurs.

#7 | Instant de réflexion pour le héros des 24 Heures du Mans |

Avril 1999: ouvreur de prestige du Tour Auto à l’occasion du centième anniversaire du Tour de France automobile, cette merveilleuse épreuve devenue une grande classique historique, Henri Pescarolo se voit confier une Matra MS 650. Le son inimitable du moteur V12 fait sensation à chaque passage. Ce fut également l’occasion pour ce grand pilote français, amoureux des 24 Heures du Mans, de découvrir le nouveau circuit de Charade inauguré dix ans plus tôt. En effet, il n’était pas venu sur cette piste depuis juillet 1972 où, sur une March 721/3, il avait participé au 4e et dernier Grand Prix de France de Formule 1 réalisé sur l’ancien long tracé de 8,055 km. Un souvenir triste pour ce champion, puisqu’il n’avait pu participé à la course, s’étant accidenté aux essais.

#6 | Woodstock auvergnat dans le livre des records |

Dimanche 21 avril 1974, le circuit de montagne d’Auvergne et ses 8,055 km accueillent leur dixième et dernier Grand Prix de France moto comptant pour le Championnat du monde dont il ouvre la saison cette année-là. Duel au sommet, celui opposant l’Italien Giacomo Agostini (Yamaha) et l’Anglais Phil Read (MV Agusta) est très attendu du public. D’autant que les spectateurs sont venus bien plus nombreux que prévu: de 100.000 à près de 130.000, ce qui fait qualifier Charade de “Woodstock auvergnat” par certains médias. 1974 est la revanche de 1972 sur les 51 virages. Aux essais, les deux idoles sont proches. En course, Ago l’emporte en 350cc. Il précède Teuvo Lansivuori (Fin/Yamaha) et les Français Christian Bourgeois et Patrick Pons tous deux sur Yamaha. Read casse. En 500cc, ce dernier inverse les rôles et monte sur la plus haute marche du podium devant Barry Sheene (GB/Suzuki) et Gianfranco Bonera (It/MV). Ago bat le record moto définitif du circuit, battant le précédant détenu par l’Anglais Mike Hailwood en 1967, avant de casser à son tour. Perchés dans les arbres ou assis sur les glissières et bottes de paille en bord de piste, les innombrables spectateurs ont savouré le spectacle de très (trop!) près. Fantastique ! Mais Charade moto a vécu ses meilleurs et derniers instants de course.

#5 |Pink Floyd en symphonie V12 pour la 100e |

En cette fraîche matinée de mi-avril 1999, les concurrents du 100e anniversaire du Tour Auto font étape à Charade. Les passionnés se rapprochent des voitures arrivant dans le paddock. Un pilote sort délicatement de sa prestigieuse Ferrari 250 GTO #38 sans créer d’attroupement. Pourtant cet Anglais est très connu des amateurs de rock progressif. Il s’agit de Nick Mason, le batteur des célèbres Pink Floyd et collectionneur de Ferrari. Il fait partie des plus de 200 concurrents inscrits à cette édition de l’épreuve. Certains spectateurs avertis ont même essayé de comparer le rugissement du moteur V12 à celui produit par ce musicien, sur scène, derrière sa batterie.

#4 | Le roi d’Ecosse sacré dans l’indifférence… |

Curieuse destinée. En cet après-midi du dimanche 6 juillet 1969, rien ne semble résister au talent du pilote écossais Jackie Stewart sur sa Matra Ford MS80. En tête du Grand Prix de France de Formule 1, il s’achemine vers une large victoire avec près d’une minute d’avance sur Jean-Pierre Beltoise au volant de la même voiture. Mais le public n’en avait que pour « son » champion national. Déjà, quatre ans plus tôt, Stewart terminait second dans l’ombre de son compatriote Jim Clark, lui aussi vénéré par le public. Comble de l’histoire, en 1972, lors du 4e et dernier GP couru sur cette piste, malgré une seconde victoire de l’Ecossais ici, les plus de 50.000 spectateurs de Charade ont ovationné le Néo-Zélandais Chris Amon ! Au volant de sa Matra MS 120D, ce dernier (3e) aurait dû gagner s’il n’avait pas été victime d’une des nombreuses crevaisons enregistrées ce jour-là. Une fois de plus, malgré les résultats, l’empathie du public n’était pas tournée vers « le roi d’Ecosse ».

#3 | Sortie de piste groupée: aucune victime |

En cette froide matinée de décembre 1990, les moutons “responsables” des espaces verts du circuit s’empressent de rentrer à la bergerie. Pour y parvenir groupés, ils n’ont pas hésité à emprunter la piste à contresens des courses et la quitter à hauteur du col de la nouvelle portion du circuit inaugurée quinze mois plus tôt. Aujourd’hui encore, le circuit de Charade pratique l’écopaturage pour l’entretien des espaces verts. Ces charmants ovins, tout du moins leurs descendants, ont la permission de brouter l’herbe grâce à un accord entre leur propriétaire et l’équipe du circuit 🙂

#2 | Le toboggan auvergnat fait toujours la Une |

Sorti début 2022, un livre sur les “Circuits de nos régions” met le circuit de Charade en couverture. Le cliché présente le départ type Le Mans des “300 km d’Auvergne” comptant pour le Championnat du monde des marques 1962. Le dimanche 15 juillet, #Ferrari, #Lotus et #AstonMartin se partageaient les premières places.
En décembre 2016, le mensuel Sport Auto proposait un hors-série “La Formule 1 des années 70” dans lequel le circuit de Charade faisait aussi la Une mais malheureusement légendé à l’intérieur “Départ du Grand Prix de Belgique 1970”, une coquille que les passionnés auront relevée.

#1 | 11 novembre sur un air de Samba |

Du monde et de l’enthousiasme en bord de piste lors du Trophée Samba à l’occasion des finales des Journées Peugeot Talbot Sport, les 10 et 11 novembre 1984.
(Photo Automobile Club/Agissons pour Charade)