Trois pilotes autrichiens ayant roulé à Charade ont laissé l’image de champions éternels. Et tous ont couru lors du Grand Prix de France sur le circuit auvergnat mais avec des fortunes diverses: Jochen Rindt en 1969 et 1970; Niki Lauda et Helmut Marko en 1972.
Le dernier a également participé à une course de prototypes 2 Litres, en 1971, avec une victoire à la clé. Un an plus tard, il perd l’usage d’un oeil pendant le Grand Prix F1. En effet, au 9e tour alors qu’il se trouve en sixième position, un gravillon projeté par une monoplace le précédant, perfore la visière de son casque et touche son oeil gauche. Une polémique sur la lenteur de l’intervention ajoutée au doute sur l’identité de l’auto qui aurait catapulté cette scorie ne pourront masquer une certitude: cet accident mit un terme à la carrière de pilote d’Helmut Marko. Et fragilisa un peu plus l’avenir de la F1 à Charade, déjà pointé du doigt pour sa sécurité insuffisante. Quarante ans plus tard, le tempérament, l’expérience de la course et du management font devenir Marko l’une des têtes pensantes de l’écurie Red Bull Racing de F1 et responsable de la filière de détection de jeunes pilotes (Red Bull Junior Team).
Quelques chiffres sur les résultats de ces trois géants d’Autriche au pays des volcans:
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Photos Paul Lutz
En cette année 1974, le Circuit de montagne d’Auvergne vit certainement sa plus belle saison sportive. Un alignement de planètes si favorable qu’avec le recul d’un demi-siècle on en oublierait qu’il s’agissait aussi d’un point de bascule vers un avenir incertain. La F1 était attendue pour l’année suivante. Hélas ! Après 1972, on ne devait plus jamais revoir le Grand Prix de France au pied du Puy de Dôme, pas plus que les motos de Grand Prix à partir de 1975.
En 1974, cinq rendez-vous majeurs confirment ce jugement.
Cette saison 1974 conclut une période d’excellence qui aura duré 16 ans en présence des plus grands champions. Mais l’évolution de la sécurité sur les circuits et les fréquentes projections de gravillons commençaient à précipiter Charade vers sa métamorphose. Ou sa fin… L’ASACA et le MCA ont ainsi connu leurs heures de gloire. Mais aussi de doutes. La moto avait prouvé sa popularité. Cependant, les Tourisme de Production et les Formule Renault Europe assureront le spectacle auto encore quelques années pour le plus grand plaisir des fidèles de Charade.
Photo Marcel Chouvy – La Montagne
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Dès sa première année d’existence, en 1958, le Circuit de Charade accueille des courses auto ou moto avec un départ « type 24 Heures du Mans », autrement dit en épi. Pour des raisons de sécurité, cette pratique a cessé. D’aucuns regrettent cette « mise en scène » qui apportait du spectacle en début de course en voyant les pilotes courir pour traverser la piste.
Lors de l’édition 1925 des 24 Heures du Mans auto (3e année) est apparu ce départ dit « en arêtes de poisson ». Mais, en 1969, le jeune pilote belge Jacky Ickx est le seul à ne pas courir pour rejoindre sa Ford GT40. Associé à l’Anglais Jackie Oliver, il gagnera l’épreuve avec 120 mètres d’avance sur la Porsche 908 d’Herrmann-Larrousse. Et convaincra ainsi avec panache les organisateurs sur les risques liés à la précipitation de nombreux pilotes (ceinture non attachée, collisions diverses). Le principe est revu en 1970. Seules les motos pratiquent encore aujourd’hui ce type de départ en Endurance.
Une quinzaine de compétitions auto (Trophées d’Auvergne et Tour de France automobile) ou moto ont bénéficié, à Charade, d’un départ « type Le Mans » jusqu’au milieu des années 70. Ensuite, rares ont été celles à intégrer cette coquetterie de protocole et seulement pour des autos à travers des formules de promotion. Chronologie de ces petits rendez-vous avec l’histoire du départ type Le Mans.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Avec son éternel casque vert, Henri Pescarolo écrit cependant en bleu sa vie de pilote.
En premier lieu, celui du constructeur français Matra, marque sportive et industrielle pour laquelle il a été un des plus fidèles et brillants serviteurs. Ses passages sur le Circuit de Montagne d’Auvergne restent toujours des instants de plaisir appréciés du public. Ses engagements pour d’autres écuries attestent de son éclectisme et de sa volonté de découvrir et d’entreprendre, notamment en dirigeant un Team à son nom pour l’Endurance.
Trois victoires aux 24 Heures du Mans avec Matra (1972,1973, 1974) dont deux avec Gérard Larrousse l’ont définitivement propulsé au club des meilleurs pilotes français de tous les temps. Petit rappel de ses apparitions à Charade.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Quinze années consacrées à la vitesse en rallye ou circuit (1961-1975) et plus du double dans l’historique ou à des postes de responsabilité dans le sport automobile y compris en Formule 1: le palmarès de Gérard Larrousse ne se limite pas à des victoires et autres nombreux podiums.
Au coeur de cette vie intense couronnée de succès, le circuit de Charade a accueilli une dizaine de fois ce grand champion français deux fois vainqueur des 24 Heures du Mans sur Matra avec Henri Pescarolo (1973/1974). Et la diversité des autos pilotées en Auvergne rappelle qu’il a oeuvré pour une douzaine de constructeurs.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Troisième et dernier volet d’une série sur des véhicules originaux ayant évolué à Charade entre 1958 et aujourd’hui.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Second volet de quelques-uns de ces véhicules.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Depuis 1958 des milliers de véhicules en tous genres ont roulé à Charade. Qu’il s’agisse de l’ancien tracé (8,055 km) ou du plus récent (3,975 km) depuis 1989. Certains d’entre eux se distinguent plus par leur apparence que leurs performances.
Coup de projecteur sur quelques-unes de ces curiosités roulantes.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Cependant, on ne peut oublier le Prix FIM 750, mis sur pied par le Moto Club d’Auvergne (MCA) en 1973, où a évolué un superbe plateau moto dans une ambiance de contestation et de revendications (sécurité insuffisante). Sur la grille de départ de la course phare, deux très belles Norton John Player 750, bandes rouges et bleues sur fond blanc, avec cadre monocoque acier conçu par le brillant ingénieur et pilote anglais Peter Williams. Ce dernier terminera 3e derrière Barry Sheene (GB) sur Suzuki et John Dodds (Aus) sur Yamaha. Son compatriote John Cooper pilotait la seconde John Player Norton (#22).
Par la suite, portant la prestigieuse livrée (liseré or sur fond noir) d’autres modèles ont roulé sur cette piste : monoplaces, barquettes, Tourisme, GT, Mitjet, motos et side-cars, mais sans revendiquer de partenariat officiel.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Très rapidement après sa création, en 1958, le Circuit de montagne d’Auvergne a séduit par son cadre et son tracé. Le côté sportif de son dénivelé ajouté aux enchaînements sélectifs et variés de sa piste exigeait un pilotage que seuls les meilleurs assuraient avec audace. Aussi, bien au-delà des années Grands Prix auto/moto du 8,055 km, des constructeurs de différents horizons et moyens financiers ont donné le nom de Charade à un de leurs modèles lancés sur le marché.
Voici quelques-uns de ces véhicules ainsi baptisés en signe d’admiration et de reconnaissance.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Entre 1958 et 1989, le Circuit de Charade accueille de grands pilotes auto ou moto à travers 14 Grands Prix de France (4 F1, 10 moto). Mais certains d’entre eux, et non les moindres, ont aussi connu cette piste dans les deux disciplines. Tous possèdent un fort tempérament. En premier lieu, voici deux d’entre eux, des Anglais, qui ont marqué leurs passages à Charade.
John Surtees (GB) : avec sept titres de champion du monde moto entre 1956 et 1960 (trois en 350 cc et quatre en 500) et un titre de champion du monde de Formule 1 en 1964, il s’est imposé en Auvergne de la manière suivante. Vainqueur en 350 et 500 cc, en 1959, sur MV Agusta lors du premier Grand Prix de France moto sur ce circuit. L’année suivante, après avoir encore dominé les essais, il termine 3e en 350 et 1er en 500, toujours sur MV Agusta. En 1960, il court conjointement en moto et en auto, F2 puis enchaîne avec la F1. Le 27 juin 1965, il décroche la 3e place du premier Grand Prix F1 à Charade, « Grand Prix de l’Automobile Club de France » au volant sa Ferrari 158 (#2) à moteur V8 de 1,5 L et 210 cv, derrière Jim Clark et Jackie Stewart. Il revient en juillet 1972, comme directeur du team portant son nom avec trois pilotes : Andrea de Adamich (It), Mike Hailwood (GB) et Tim Schenken (Aus) qui termineront 17e, 6e et 14e (Surtees TS9B 3 L) du dernier Grand Prix de France F1 couru à Charade. La même année, Surtees arrête la compétition, comme pilote, mais poursuit sa fonction de constructeur de F1 jusqu’en 1978 après l’avoir commencée en 1969. Il décède le 10 mars 2017 à 83 ans.
Mike Hailwood (GB) : en 1961, il apparaît pour la première fois sur le « toboggan » auvergnat avec deux places de 2e (en 250cc sur Honda et en 500 sur Norton) et une de 4e en 125 sur EMC. En 1962, il chute en 125 (EMC) et laisse le champ libre aux Honda. En 1966, on se souvient du bruit phénoménal de sa Honda 250 six cylindres, la célèbre RC 166. Une partie de l’agglomération clermontoise, en contrebas, pouvait entendre le rugissement de ses 57 cv à 18.000 tours/minute dans la descente de Gravenoire. « Mike the bike » devient cette année-là le héros du Grand Prix de France avec cette incroyable mécanique. Meilleurs temps aux essais, il s’adjuge la première place en 250 devant Jim Redman (Honda) et précède Giacomo Agostini (MV Agusta) en 350. 1967, le public est au rendez-vous avec son idole (#1). Mais la boîte de vitesses de sa 250 donne du fil à retordre au puissant pilote britannique: 3e derrière Bill Ivy et Phil Read (GB) sur Yamaha, malgré une fulgurante remontée et un record du tour moto à 134,250 km/h qui tiendra jusqu’en 1974 (Agostini/Yamaha 500 à 136,525 km/h). En colère, le champion refuse de monter sur le podium. Il ne reviendra à Charade qu’en 1972 pour le Grand Prix de France de… F1 au sein de l’équipe de John Surtees (Surtees TS9B #26). 10e temps des essais, il termine à la 6e place cette course gagnée par Jackie Stewart (Tyrrell Ford).
Hailwood sera 9 fois champion du monde moto entre 1961 et 1967 (3 en 250, 2 en 350, 4 en 500) pour une dizaine de marques notamment MV Agusta et Honda. En auto, il devient champion d’Europe de F2 en 1972 et affiche 50 participations en F1, de 1963 à 1974, sur Lotus, Lola, Surtees et McLaren. Il disparaît le 23 mars 1981 à 40 ans. A suivre…
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Son parcours sportif n’aurait pu se résumer qu’à des compétitions régionales. Mais le bouillonnant Clermontois Roland Charrière a vu son énergie récompensée par quelques coups d’éclat en inter. Sans oublier son engagement pour préserver un avenir serein à son cher Circuit de montagne d’Auvergne. De son garage Renault installé en 1969 rue Montpela-Bujadoux dans le quartier des Salins, au centre de Clermont-Ferrand, jusqu’à son dernier souffle, en passant par les ors du palais de la Principauté de Monaco pour être récompensé de sa 9e place et 1er privé au Rallye de Monte-Carlo 1970 (notre photo) : son implication à la cause du sport automobile mérite reconnaissance. Pour en parler, Danièle, sa fille (photo avec Roland à Charade), complice de toujours et passionnée de course auto. « Son enthousiasme sans détour lui a valu quelques échanges aigres-doux musclés avec la mairie lorsqu’il tenait la station-service boulevard Léon-Malfreyt. Sa première course Inter fut le Monte-Carlo 1959 avec une Dauphine Gordini et Jacques Beylot pour copilote. Il était parti de Lisbonne avec deux pneus dans le coffre ! ». Le 7 juillet 1963, il fait une modeste apparition sur René Bonnet Djet #82 (notre photo) aux 3 Heures d’Auvergne à Charade. En juin 1964, il s’aligne aux 24 Heures du Mans sur une René Bonnet RB5 (1,2L) #60 avec l’Italien Bruno Basini (ab. au 44e tour). Le 19 juillet suivant, à Charade, il participe au Grand Prix de France de Formule 2 (1000cc) sur une monoplace René-Bonnet #22. Au départ se trouvent Jackie Stewart, Denis Hulme et Jochen Rindt : l’antichambre de la F1 ! Il termine 15e après quelques pépins mécaniques. Puis, sur Alpine, 16e au Tour de France 1969 et 5e au Lyon-Charbonnières 1970. Entretemps le Monte-Carlo 1970 toujours avec Yannick Castel pour coéquipier. « Grâce à sa performance au volant de sa 1600S #92, Alpine Renault lui fit bénéficier de son assistance en cours de rallye alors que devant ne restait plus qu’une berlinette d’usine, celle de Jean-Pierre Nicolas, 3e du général. Ce résultat le confirme sur la liste des 20 meilleurs pilotes français du moment. »
Sociétaire de l’ASACA (Association sportive de l’Automobile Club d’Auvergne), Roland Charrière en part pour rejoindre l’ASA Dômes Forez dont faisait partie l’écurie Clermont Racing. Elle regroupait des pilotes auvergnats majeurs : Patrick Depailler (photo avec Roland), Philippe Bugalski, Roger Debacker, Roger Janvier, Jacky Verdier et Georges Groine, le transporteur. Ce dernier permit à Charrière d’accueillir les premiers camions dès 1982 sur la piste de Charade à l’occasion des courses de côte (slalom 79 puis nationale Manson 80-88) que le Clermont Racing organise. Roland crée l’ASA Clermont Racing en 1974. Entre 1969 et 1974, Danièle prend goût à la compétition avec ses célèbres R8 Gordini blanches puis une Alpine. Trois ans de suite (70,71,72) elle termine 3e du Critérium national (championnat de France) et s’illustre en rallye avec sa coéquipière Michèle Bordes. « Je me retrouvais derrière des pointures comme Marie-Claude Beaumont et Marianne Hoepfner ! »
Roland jette toutes ses forces dans la défense de Charade alors que monte une fronde hostile au développement du circuit et du bruit qu’il générait. Pétition massive, tentative de faire classer le circuit « d’utilité publique », Préfecture, Conseil d’Etat… Puis à partir de la fin des années 70, les initiatives du valeureux Clermontois se multiplient : Raid humanitaire camion Objectif Sud 89, course de côte de Châtel-Guyon… alors que le cancer se manifestait. En 1988, il reçoit la médaille d’or Jeunesse et Sports. Il disparaît en 1990 laissant une empreinte inoubliable dans la vie du Circuit de Charade qu’il aimait tant. L’ASA Clermont Racing existe toujours.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Héritage de l’ancien tracé de huit kilomètres, le « virage de la Ferme » est surtout connu de ceux qui ont fréquenté la piste. Que ce soit avant 1989 (8,055 km), que ce soit depuis (4 km). Ce secteur éloigné de tout est inaccessible au public. Il a toujours bénéficié d’un sentiment particulier. Les pilotes en apprécient la difficulté technique.
Situé en surplomb du village de Champeaux bas, il intervient dans le prolongement de la liaison entre la nouvelle et l’ancienne piste. Il offre un enchaînement gauche/droite digne d’un « pif-paf » qui faisait face à une ferme que les pilotes n’avaient guère l’occasion de regarder. Surtout en moto ou en Formule 1. C’est le cas du grand champion anglais Graham Hill (cliché noir et blanc). En juillet 1969, lors du Grand Prix de France, sa Lotus Ford Cosworth 49B (R10) #1 semble slalomer sur ce « S » majestueux. Ce qui élevait ce site au rang des portions les plus sélectives de Charade. Et justifiait ce dernier comme circuit de montagne qui ne pardonne pas. Sous la férule de Colin Chapman, patron de l’écurie Lotus, Hill terminera la course 6e après avoir obtenu le 8e temps aux essais sur seulement treize F1 engagées.
Pilote moto en historique, le Clermontois Patrick Foucart (notre photo) apprécie le virage de la Ferme lors de démonstrations (Charade Heroes, Charade Super Show et Charade Moto Rétro). Au guidon de sa belle 750 Suzuki TR orange et blanche (une réplique du modèle de 1973), il a pu le juger. Et décrit avec enthousiasme le comportement à adopter dans cet enchaînement : « C’est un passage très intéressant de l’ancien tracé ! Après le premier gauche qui bénéficie d’un banking naturel, le changement d’angle est très rapide. On bascule aussitôt pour négocier le droite afin d’aborder la descente vers le Petit Pont dans les meilleures conditions. C’est physique ! Et après, on essaie d’ouvrir le plus vite pour reprendre de la vitesse. » Autant dire que, lors des courses, les concurrents auto ou moto ne s’attardent pas sur ce secteur.
Un poste de secours se trouvait à la sortie du S côté extérieur de la piste, dans la version d’avant 1989 du circuit (photo N/B de 1969). Il faisait face à celui de la Ferme qui portait le #10 sur un total de 14 postes occupés. A partir de 1989, le poste de la Ferme est devenu le #16 sur 21 occupés… soit sept de plus pour une longueur de piste divisée par deux ! Celui de sortie porte le #17 mais se situe du même côté que le 16 c’est-à-dire à l’intérieur du circuit.
Détruite par les services du Département lors de la construction de la nouvelle piste, la Ferme avait été incendiée par son ultime locataire quelque temps avant ce chantier. Aujourd’hui seuls commissaires de piste, secouristes et journalistes peuvent stationner en ce lieu. Certainement dans l’ignorance des nombreuses « passes d’armes » qui s’y sont déroulées autrefois sur la piste…
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Ferrari naquit dans le jaune. Cependant on lui associe généralement le rouge. Quelle qu’en soit la couleur, la marque de Maranello brille de mille feux sur toutes les pistes et dans tous les registres (rallye, endurance, F1). Charade fait partie de ce décor sportif. On se souvient des véloces 250 GT et 750 Monza (années 58 à 63) lors des Trophées d’Auvergne ou de la Testa Rossa de Lorenzo Bandini victorieuse des 3 Heures d’Auvergne le 7 juillet 1963 ou des 365 P2 et 250 LM des Anglais David Piper et Richard Atwood en 1967. Idem des prestigieuses 250 GTO et Daytona 365 GTB4 inscrites régulièrement à ces courses ainsi qu’au Tour de France automobile puis au Tour Auto contemporain. Arrivent ensuite les Formules 1 312 B et 312 B2 lesquelles, entre les mains expertes du pilote belge Jacky Ickx ont séduit lors des Grands Prix de France 1970 et 1972. Enfin le 1er octobre 2023, Charade Classic « Italiennes » comprend une parade qui regroupe une trentaine de Ferrari sportives.
Enfin, émotions intenses avec les inoubliables sport-prototypes 512 M de cinq litres de cylindrée. Evolutions de la 512 S en 1970, elles pouvaient atteindre les 340 km/h. Racées, puissantes (630 cv) et un V12 rugissant ont façonné l’histoire de ces « bêtes » créées en Endurance pour défier les irréductibles Porsche 917. Deux exemplaires ont découvert l’asphalte de Charade : en 1971 et 2023.
Pour leur seul passage sur le Circuit de montagne d’Auvergne, toutes deux ont marqué les esprits. Que ce soit la jaune à bandes vertes Tergal et rouges de l’Escuderia Montjuich (#142) ou bien la rouge (#251) de son pilote-propriétaire fidèle des courses historiques organisées par Peter Auto. La première disposait du châssis #1002. Elle termine 2e aux 1000 KM de Paris 1970 (Montlhéry) et 2e du Tour de France automobile 1971 dont une victoire à Charade. On la retrouve bien des années plus tard dans les courses historiques entre les mains de gentlemen drivers successifs : Robert Horne, Dieter Roschmann ou Carlos Monteverde. En 2016, elle « s’illustre » dans une petite rue au cœur de Londres affublée d’un PV pour stationnement gênant à proximité du siège de Fiskens, société de vente de voitures de prestige qui réalisait quelques photos de la belle ! Il semblerait que ces dernières années, une copie ait vu le jour pour préserver l’originale estimée à 13 millions d’€.
Lors de l’étape de Charade du Tour de France automobile, le 24 septembre 1971, Jean-Pierre Jabouille met plus d’une minute aux Matra MS650 de Larrousse et Fiorentino sur l’ancien tracé de 8,055 km. Il était associé à José Juncadella (propriétaire) et Jean-Claude Guénard. De son côté, la deuxième, la rouge de « Mr John of B » semble être une superbe réplique « maison », de l’aveu de son pilote. Le jeudi 20 avril 2023, elle a ravi le public du Tour Auto Optic 2000 sur la boucle de quatre kilomètres du Charade moderne jusqu’à ce qu’elle parte en vrille entre l’épingle Marlboro et l’entrée de la courbe de Thèdes, roue arrière gauche explosée : course terminée puis abandon.
Plus d’un demi-siècle sépare ces deux courses. Et la magie opère toujours… en rouge et jaune.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Elle n’est ni la plus belle, ni la plus chère, encore moins la plus rapide. Mais sur le plan affectif, les Français lui accordent une place privilégiée dans leur production automobile nationale. En 2024, la Traction Avant Citroën fête ses 90 ans. Et le Circuit de Charade réserve à cet événement un rendez-vous digne des hôtes les plus prestigieux : du jeudi 9 au samedi 11 mai, près d’un millier de ces modèles réalisés entre 1934 et 1957 se retrouveront dans l’enceinte de ce temple des sports mécaniques. Déjà, lors du caniculaire été 2003 puis deux ans après, au pied des volcans, la piste et le paddock avaient accueilli des festivités consacrées à cette voiture populaire. Chacune de ces deux « Tractionades » regroupa plus de 500 modèles parmi les près de 760.000 produits par la marque au double chevron.
En 2024, au cours des trois journées « anniversaire » organisées par La Traction Universelle (club international basé dans la Drôme) épaulée par le très auvergnat Traction Club des Volcans (TCV) présidé par Bruno Murat, exposition, épreuves d’endurance et autres parades ne manqueront pas de mettre en valeur les différents modèles (7, 11 et 15). A partir de 1936, ces derniers gommèrent les imperfections techniques de leurs débuts grâce à la prise de contrôle de Citroën par Michelin.
Les belles Tractions ne manqueront pas de flatter les pupilles. Parmi ces vedettes, celle de Thierry Bissiriex (TCV) une version commerciale de la 11 dont son propriétaire évoque avec fierté la montre spéciale vissée au centre du volant : « Il faut très souvent la remettre à l’heure ! Mais je dois cette passion à mon grand-père paternel. Mon auto affiche aujourd’hui près de 120.000 kilomètres. »
Durant le conflit de 1939-1945, l’élégance de la « Traction » avait attiré le regard des belligérants. Tant la Résistance que la Gestapo l’utilisèrent comme véhicule officiel, synonyme d’autorité. Il est vrai que ses lignes pures et son noir strict en imposent. La classe, appréciée du pouvoir, des uniformes et, parfois, des gangsters. Un chapitre important de l’histoire et du patrimoine industriel français. La gamme proposait des variantes de 4 ou 6 cylindres (voire 8 cylindres en V pour le prototype !) avec des boîtes à 3 vitesses pour des puissances de 32 à 77 chevaux avec une cylindrée de 1303 à 2867 cm³. Quelques exemplaires se sont illustrés en compétition à cette époque.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Rencontré dans les allées du salon Epoqu’auto 2023, à Lyon, Jean-Claude Andruet ne pouvait passer inaperçu. A l’aise dans sa combinaison de course comme aux plus beaux jours, le célèbre pilote français affiche, à 83 ans, un enthousiasme de jeune premier. Il appartient à cette génération de surdoués du volant. Certes, il ne revendique aucun titre en monoplace malgré une approche en F3. Son truc c’est la route avec les rallyes, la course de côte et, accessoirement, le circuit en proto et GT.
Surnommé « la panique » car rêveur et vite angoissé, il aura testé quelques bolides emblématiques. A commencer, en début de carrière, par la mythique Renault 8 Gordini. C’est à ce moment qu’on le trouve pour la première fois sur le circuit de montagne d’Auvergne. En ce dimanche 20 juin 1966, la nouvelle Coupe nationale des fameuses « Gordoches » fait une première apparition sur le tracé de 8,055 km. Meilleur temps aux essais et victoire sans discussion en course ! La petite Renault de 1100 cc porte le numéro 1 que son pilote honore de la plus belle manière.
A l’évocation du circuit de Charade, Jean-Claude dit avoir bien sympathisé avec l’Auvergnat Patrick Depailler. Il rappelle avec ferveur sa 2e place lors du passage du Tour de France automobile 1972. Et la « bourre » qu’il a vécue face à l’Anglais Vic Elford, tous deux au volant d’une Ferrari Daytona 365 GTB4. « A un moment, nous nous sommes retrouvés face à face ! » Au classement général final du Tour, Andruet l’emportera avec sa célèbre copilote Michèle Espinosi-Petit alias « Biche ».
Entre ces deux épreuves, Jean-Claude décroche une 9e place de la course des 300 km GT/Proto dans le cadre des Trophées d’Auvergne 1967. Autant dire que sa petite Alpine 1150 ne pouvait rivaliser avec les trois puissantes Ford GT40 de tête qui ont rencontré une belle opposition avec la Matra 2 Litres d’un Jean-Pierre Beltoise accrocheur. « Mais elle a tenu tête aux Ferrari ! ».
On le retrouvera ensuite dans les volcans, en juin 1973, lors de la manche du Championnat d’Europe des protos 2 Litres avec une des trois Abarth Osella PA1. Portant le numéro 30, le Français terminera 9e, bien loin des Lola et Chevron, montures les plus en vue cette saison-là. Quelques semaines plus tard, le retrait prématuré de sa Lancia Stratos l’empêche de s’aligner à Charade à l’occasion du Tour de France automobile. En 1974, sa Stratos termine 6e à Charade et 3e au général. Suivent une victoire aux 24 Heures de Spa 1977/BMW, 2e en 1981 et titres en Historic dans les années 2000-2010.
Quelques Tour de France automobile plus loin couronnés de succès (2e/1979, 1er/1981 & 1982, 2e/1984), Andruet n’aura l’occasion de retrouver Charade qu’en… 2021 lors de la Coupe de France des circuits à bord d’une Peugeot 505. Et de découvrir le nouveau tracé où seule l’ancienne portion est à son goût. Champion de France des rallyes en 1968, d’Europe et de France des rallyes en 1970, trois fois vainqueur du Tour de France automobile, 20 participations aux 24 Heures du Mans : le héros du Monte-Carlo et du Tour de Corse a fait preuve d’éclectisme et d’adaptation aux terrains et aux équipes. Premier pilote français à valoriser une femme copilote, une attitude qui fera école, Jean-Claude aura connu et comparé des autos françaises et italiennes. Son coup de cœur ? « Sans hésiter, la Lancia Rally 037 au sein d’une équipe avec qui le courant passait. ».
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Traits d’union entre l’asphalte et les espaces extérieurs, les commissaires de piste se reconnaissent par leur combinaison de couleur identique. Presqu’inconsciemment on les intègre à l’environnement du circuit. Chargés de la sécurité dans le cadre du bon déroulement des compétitions, ils interviennent drapeau en main pour toute irrégularité de conduite ou en cas de panne, de risque d’accident (huile ou pièces sur la piste) voire d’accident. Ils communiquent aussi avec la direction de course et les services de secours. A Charade, ils dépendent de l’ASACA (Association sportive de l’Automobile Club d’Auvergne) pour les courses auto ou d’Auvergne Moto Sport, héritier du Moto Club d’Auvergne, pour les compétitions moto. En juillet 1958, les courses inaugurales avaient fait appel à 47 « commissaires de route » rebaptisés plus tard commissaires de piste. Leur compétence couvrait, en effet, les événements en circuit, en rallye et en course de côte.
Aîné de ces bénévoles indispensables, Jean-François Cassant officie sur le Circuit de Montagne d’Auvergne depuis 1969. Il a participé aux trois Grands Prix de France F1 de 1969, 1970 et 1972 sur l’ancien tracé de 8,055 km. Pour cette même période, ce sont les Grands Prix de France Moto de 1972, 1973 (750cc) et 1974 qui l’ont mobilisé. Auxquelles s’ajoutent les nombreuses compétitions dans le cadre des Trophées d’Auvergne, Coupe de France des circuits, TTE, Historic Tour, passage du Tour de France automobile devenu Tour Auto, Grands Prix camions et formules de promotion.
De ses participations, « Jef » s’est constitué une imposante armoire à souvenirs peuplée d’images et de rencontres voire d’amitiés. Ce réservoir de faits d’armes s’étoffe de nombreuses missions sur d’autres circuits illustres : Magny-Cours, Le Castellet Paul-Ricard (auto et moto), Albi, Dijon, Lédenon, Spa Francorchamps, Super-Besse Andros. En 2023, il fêtait sa 54e participation aux 24 Heures du Mans auto avec la victoire et le grand retour de Ferrari en catégorie reine « Hypercar ». « A l’occasion de ma 50ème année de présence au Mans, Pierre Fillon, président de l’Automobile Club de l’Ouest, le célèbre ACO gestionnaire des circuits du Mans, avait rappelé, lors de la réunion précédant la course que j’étais le plus ancien commissaire de piste bénévole de cette épreuve phare du Championnat du monde d’Endurance (WEC). C’est aussi lors de cette célèbre course que j’ai tissé des liens d’amitié avec le Docteur Ulrich, patron d’Audi des années 2000, et Dave Richards (Prodrive, Aston Martin). J’ai aussi sympathisé avec les pilotes Jacky Ickx, Stéphane Ortelli et le Japonais Yojiro Terada (Mazda). » Enfin, Jean-François a eu le privilège d’être commissaire de piste pour le Grand Prix F1 de Monaco à 13 reprises.
Indissociable de l’histoire de Charade, le sympathique barbu clermontois a connu tous les postes de ce site et par tous les temps. Il se souvient particulièrement de cette épreuve de Tourisme Production lors des Trophées d’Auvergne 1982 où, entre les deux fameux virages « Jumeaux » dans la descente de Gravenoire, qu’un tête-à-queue de la Rover 3500 de René Metge aurait pu provoquer un important crash : « Ce jour-là, pendant un tour de la course, j’ai agité le drapeau jaune plus frénétiquement que jamais pour éviter le pire ! ».
Avec les années, Jean-François a plus que jamais conscience du paramètre « sécurité ». Mais il prend toujours plaisir à accompagner ses amis commissaires de piste à Charade, les gardiens du temple…
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Très tôt depuis la création du circuit, en 1958, les courses de moto ont laissé une empreinte singulière, souvent attachante. Parmi elles, la catégorie 50 cm³ s’est taillé une place originale, au même titre que les side-cars. Début de week-end en amuse-gueules pour les premiers, fin de repas roborative pour les seconds. Malgré 3 à 8 vitesses, les « tasses à café » ont souffert du manque de chevaux (5 à 18) et des écarts de température sur les fortes pentes du « toboggan auvergnat ».
À neuf reprises entre 1961 et 1974, la plus petite cylindrée sur deux roues s’est exprimée sur cette piste : quatre en catégorie Nationale et cinq en Inter lors des championnats du monde. Président d’Auvergne Moto Sport, digne héritier du Moto Club d’Auvergne (MCA), Claude Astaix se rappelle du challenge que représentait la venue des 50 cm³ à Charade : « C’était un coup de poker, et ça a marché ! » Pour rappel, le pilote hollandais Henk Van Kessel remporte sur ce circuit, en 1974, son premier Grand Prix en 50. Il devient champion du monde la même saison sur son prestigieux Kreidler (#5 à Charade) de l’importateur Van Ven, succédant ainsi à son compatriote Jan de Vries. Avec les mêmes couleurs vert et orange des Pays-Bas, une très belle réplique était présente lors du Charade Moto Rétro en 2022 (photo couleur). Avec l’accord de Van Kessel, elle a été assemblée par un passionné auvergnat, Guillaume Dumas, autour d’un cadre réalisé par le spécialiste Jaap Voskamp.
Pour sa part Lionel Gavard, pilote local avec deux participations, a vécu les premières compétitions de 50 à Charade. Il se souvient des coulisses de certaines courses et de leurs palmarès. Ainsi, Claude Serre remporte la première, en 1961, à plus de 83 km/h de moyenne sur un Itom italien. L’année suivante, la victoire Inter revient à Jan Huberts (NL) sur Kreidler face à Honda, Suzuki et une horde de Derbi espagnols. 1963 voit l’Allemand Hans-Georg Anscheidt imposer son Kreidler en Inter. Avec la même marque, Jean-Pierre Beltoise termine 4e. Il trouvera d’autres occasions de briller à Charade sur deux et quatre roues. Son frère Michel roule sur Itom dans l’épreuve des Nationaux. Le Clermontois André Fargeix (Itom) réalise le 1er temps des essais et gagne à l’issue des cinq tours de course. Gavard (#12, photo N/B) est sélectionné pour piloter un Derbi d’usine prêté par Jacques Roca. Malheureusement il devra abandonner. Avec le numéro 36, un certain Patrick Lachaux court sur une Spéciale MB (Benelli préparée par Motos Blatin). En réalité, il s’agit d’un autre Clermontois qui s’illustrera plus tard au plus haut niveau : Patrick Depailler ! Il porte un pseudo afin de cacher son engagement à ses parents. En 1964, le Néo-Zélandais Hugh Anderson place sa Suzuki sur la plus haute marche du podium Inter. Beltoise 3e sur Kreidler. En National, Fargeix s’arrête, Gavard prend la 4e place, Depailler 13e. 60 ans plus tard, Lionel reconnaît que « ces épreuves changeaient ces motards de l’esprit blousons noirs rencontré en ville. A Charade, on n’était plus dans le même monde ! » 1967 : Charlie Dubois (Kreidler) gagne en National. En Inter, Yoshimi Katayama (Suzuki) l’emporte à près de 113 km/h de moyenne. Enfin arrive 1974, l’année de tous les records (photo départ) : plus de 100.000 spectateurs, des champions, des chronos, des bottes de paille, des gendarmes… Et la victoire de Van Kessel. 13 fois champion du monde (50 et 125), l’Espagnol Angel Nieto (Derbi) n’aura jamais brillé à Charade : 5e en 1967 (50); abandon en 1972 (125) et 1974 (125).
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Un brillant parcours professionnel et sportif, un enthousiasme communicatif et une énergie à toute épreuve. Louis Rosier, le natif de Chapdes-Beaufort (le 5 novembre 1905) dans les Combrailles du Puy-de-Dôme avait tout du leader accepté par le plus grand nombre. Pionnier français de la Formule 1 et des 24 Heures du Mans, ce garagiste clermontois et patron d’écurie aura vécu des hauts et des bas à la mesure de son tempérament.
Comme nombre de ses concurrents, Louis n’attend pas ses 20 ans pour goûter à la compétition en sports mécaniques. Il choisit la moto (courses de côte, moto-cross). Puis il se tourne vers l’auto et fait ses preuves au volant à travers des compétitions régionales puis nationales et inter. Première participation en Endurance lors des 24 Heures du Mans 1938 qui se solde par un abandon sur une Talbot Lago T150 SS, associé à Robert Huguet. Le long intermède de la guerre en fait un Résistant maquisard et son « Garage des Boulevards », voisin d’usines Michelin, devient une concession Renault où les véhicules de la Gestapo pouvaient être victimes… d’un sabotage maison !
Dès 1946, retour aux compétitions permettant à son palmarès de s’étoffer : champion de France de vitesse (1949, 1950, 1951, 1952). L’année 1950 consacre le pilote auvergnat : 4e du premier championnat du monde des conducteurs de Formule 1 avec plusieurs victoires de Grands Prix; vainqueur des 24 Heures du Mans où il restera au volant de sa Talbot-Lago T26 l’intégralité de la course, ne laissant à son fils Jean-Louis que deux tours en piste. Louis crée l’Ecurie Automobile d’Auvergne en 1951. Devenue Ecurie Auvergne, elle est actuellement présidée par Jean-Claude Mathieu.
Sa fidélité à Talbot-Lago, la marque française de Suresnes, est inévitablement associée aux succès du professionnel de Clermont-Ferrand. Une ville qui, dès 1956 se cherchait un nouveau terrain de jeu pour ses courses. Au côté de son ami Jean Auchatraire, président de l’Association sportive de l’Automobile club d’Auvergne (ASACA), Louis Rosier propose un site dont il échafaude un tracé à Gravenoire au-dessus de Royat. Un tracé de 8 kilomètres proche de villages de Saint-Genès-Champanelle fut ensuite validé alors que le champion venait de perdre la vie 22 jours après un accident à Montlhéry. Charade, le Circuit de Montagne d’Auvergne fut inauguré le dimanche 27 juillet 1958. Le virage menant à la ligne d’arrivée porte son nom. Une photo géante sera très tôt remplacée par une stèle. Face à la piste, elle porte le nom de Louis Rosier. Début 2023, Elodie Rosier, petite-fille de Louis (notre photo), annonce le projet d’un musée consacré à ce grand pilote : L’Aventure Louis Rosier.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Sa discrétion l’aura accompagné jusqu’au bout du voyage. Disparu à 50 ans le 18 mai 2023 à Clermont-Ferrand, Laurent Gauvin laisse une empreinte indélébile de sa passion pour le sport automobile. Des livres, des maquettes au 1/43e aux côtés de son ami Michel Lépine, président du Maquette Club de Châteaugay, autre passionné de Charade lui-aussi décédé, et quelques magazines resteront gravés comme son héritage dans ce domaine. Et le circuit de montagne d’Auvergne joue ici un rôle de tremplin et de plaque tournante.
Les rallyes, les champions auvergnats d’exception Philippe Bugalski et Patrick Depailler et, comme apothéose finale, une publication « kolossale » sur la Porsche 917 (Ed. Syllabe) à l’occasion des 50 ans de cette voiture mythique en 2019 (*). L’usine allemande lui avait ouvert ses portes avec de nombreux documents pour réaliser son ouvrage de 568 pages et 4,8 kg, tiré à 917 exemplaires et traduit en anglais. Laurent a même fait venir dans l’agglomération clermontoise un des 69 modèles construits par l’usine de Stuttgart. Aux couleurs du Martini Racing, elle était homologuée pour rouler sur les routes. C’est ainsi, qu’en 2019 et à son volant, son pilote propriétaire monégasque s’est rendu à Châteaugay, près de Clermont-Ferrand, afin d’y rejoindre le studio où devaient être réalisées des photos.
Lors de l’été 2020 s’est déroulée la deuxième édition de Charade Heroes organisée par le Clermontois Claude Michy. Laurent Gauvin était intervenu pour la participation de Gérard Larrousse à cette manifestation historique. En effet, le pilote français, fidèle de Porsche en Endurance, a rédigé la préface du livre sur la 917. Par ailleurs, il avait brillé sur l’ancien tracé de 8 km de Charade entre 1969 et 1974 : Tour de France automobile et Trophées d’Auvergne avec Porsche 911, Matra MS 660, Ligier JS2, Lola T292 et Alpine A441.
Ainsi, en 2020, Larrousse est revenu à Charade et a piloté la Porsche 917 LH (longue queue #3 aux couleurs très psychédéliques) avec laquelle il a terminé 2e aux 24 Heures du Mans 1970 associé à Willy Kauhsen: un régal pour les yeux et les oreilles et une première à Charade! Ce jour-là, Laurent se sentait bien sur cette piste non loin de chez lui…
(*) Une version moins étoffée de cet ouvrage a également été publiée.
Guy Lemaître (texte et photos)/Agissons pour Charade
S’il est des saisons qui laissent peu de souvenirs, celle de 2023, en revanche, est à marquer d’une pierre blanche. Pour sa troisième année aux commandes de l’exploitation du circuit de Charade, le groupe GCK a frappé un grand coup sur la piste et dans les paddocks. Particulièrement développée, la médiatisation des événements a bénéficié en retour d’une fréquentation exceptionnelle.
Avec cinq rendez-vous, les rassemblements Charade Classic se sont terminés en apothéose, le 1er octobre. Près de 1.200 voitures de collection sur le thème des Italiennes, une triple parade comprenant une trentaine de Ferrari et un public dépassant les 5.000 visiteurs, le tout sous un soleil estival : de bon augure pour fêter le dixième anniversaire en 2024 !
Le Tour Auto était aussi de la partie le 20 avril. Un plateau toujours aussi étoffé concocté par Peter Auto avec un prototype Ferrari 512 M de 1970 auteur d’une spectaculaire embardée entre le virage Marlboro et le S de Thèdes.
Trophée Tourisme (TTE), Trophée des volcans et Ultimate Cup 208 ont permis aux formules de promotion de prouver leur intérêt sportif. Mais le plat de résistance restera, sans ambiguïté, la 2e édition du Charade Super Show le dimanche 21 mai. Une douzaine de champions auto et moto de différentes époques dont Giacomo Agostini, Jacky Ickx, Sébastien Loeb et Christian Sarron, des bolides d’anthologie ou du futur (électrique). Et du spectacle avec, en prime, l’ouverture de l’ancien l’ancien tracé de 8 km le matin. Grand patron de GCK, Guerlain Chicherit était aussi de la fête avec un enthousiasme flagrant. Bilan : quelque 12.000 spectateurs emballés par les parades et démonstrations. Certains observateurs faisaient un parallèle avec le Goodwood Festival of speed, référence anglaise pour ce type de manifestation historique.
Début septembre, le Grand Prix camions a fait aussi le show avec 12.000 passionnés venus de toute la France. Charade associe histoire et avenir…
Guy Lemaître/Agissons pour Charade (texte et photos)
Il y a l’Histoire, ceux qui la font, ceux qui la racontent et ceux qui l’immortalisent par l’image ou le texte. Esthétique, performances et passions se conjuguent au futur dans un univers tapissant un mur de chambre, de salon, de restaurant, de garage ou d’atelier. Parmi eux se trouvent des établissements privés mais accessibles au public car relevant du commerce. Quelques-uns recèlent ces documents attestant d’instants de course sur l’asphalte du circuit de Charade.
Un départ, une arrivée, une belle trajectoire, un dépassement ou un portrait fixé par l’objectif d’un photographe ou le crayon d’un dessinateur. A travers posters et affiches, couleurs ou noir et blanc valorisent ces témoignages en embellissant ces espaces. Par leur proximité géographique avec le circuit, ils se souviennent des rugissements des bolides dévalant la descente de Gravenoire. Certains propriétaires actuels passionnés ont voulu rappeler ces épopées dans leurs établissements.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Au printemps 2022, le chantier de modernisation de la tribune, construite au début des années 1970, créa de nouveaux espaces. Notamment deux salles de travail baptisées « Interlagos » et « Laguna Seca », noms de deux circuits situés au Brésil pour le premier et en Californie pour le second. Le choix de ce dernier coule de source tant de nombreux points le rapprochent de Charade.
Inauguré en novembre 1957 (27 juillet 1958 pour Charade), Laguna Seca domine les collines de Salinas, du comté de Monterey au sud de San Francisco. D’une longueur de 3,6 km (3,9 km pour Charade depuis 1989 ; 8 km et 51 virages auparavant), il se compose de 11 virages (18 à Charade) dont le « S », aveugle et en dévers, de l’emblématique Corkscrew (tire-bouchon) situé au point culminant du site. Ce dernier n’est pas sans rappeler l’épingle de Champeaux, le S de la Ferme ou le pif paf à l’entrée de la courbe de Thèdes au cœur des volcans d’Auvergne. Le circuit américain présente un dénivelé de 55 mètres qui avoisine celui de son homologue français.
Sous l’influence du Pacifique, Laguna Seca se drape souvent de brouillard et de… sable. Un petit plan d’eau, la lagune, occupe l’espace central. Le Monterey County Parks Department est le propriétaire alors que le Département du Puy-de-Dôme possède Charade, traversé par un ruisseau, l’Artière.
Le tracé américain accueille des compétitions auto (IndyCar, etc.) et moto ainsi que de l’historique à l’occasion d’événements très prisés tel le hill climb (course de côte), des courses classiques ou le Porsche Rennsport Réunion (grand rassemblement autour de la marque de Stuttgart). D’avril à octobre, ce calendrier s’étoffe d’animations sportives comme le cyclisme. Idem pour Charade avec le VTT électrique, le trial moto thermique, les véhicules tout-terrain et le paintball. Sur ces deux sites, le rôle des bénévoles s’impose de plus en plus avec la particularité, côté Pacifique, d’attirer les associations de vétérans (anciens combattants). Ces deux très belles propriétés et leurs exploitants (Sports Car Racing Association of the Monterey Peninsula d’un côté et Groupe GCK de l‘autre) ont compris la nécessité d’associer le passé aux exigences environnementales et touristiques de demain. Cars and Coffee à Monterey et Charade Classic attirent des centaines de collectionneurs le dimanche.
Voici les grands pilotes encore en vie ayant couru sur les deux circuits dans les années 60, 70 et 80 (F1 et autres championnats à Charade ; CanAm, Proto aux USA): le Français Jean-Pierre Jarier, l’Ecossais Jackie Stewart; les Anglais Derek Bell, Jackie Oliver, Brian Redman. Puis ceux disparus avant 2024: François Cevert, Patrick Tambay (France); Vic Elford, Stirling Moss, John Surtees (GB) ; Dan Gurney (USA) ; Pedro Rodriguez (Mexique) ; (GB) ; Jo Bonnier (Suède) ; Chris Amon, Denny Hulme, Bruce McLaren (NZ). Pour la petite Histoire, l’Américain Pete Lovely a gagné la 1e course à Laguna Seca (1957) sur une barquette Ferrari 500 TR. En 1970, pour le G P de France, ce pilote privé avait transporté sa Lotus 49B jusqu’au paddock de Charade sur un Combi Volkswagen « aménagé » ; il était concessionnaire VW à Seattle. Accidenté aux essais, il ne put qualifier sa monoplace #25.
La 2e édition de Charade Super Show, le 21 mai 2023, a vu rouler une rare McLaren M8B orange, vedette de l’impressionnant challenge CanAm des années 66-74 avec Laguna Seca. Prémonitoire ?
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Les camions sur la piste du circuit de Charade : une aventure qui a débuté timidement dans les années 80 pour devenir aujourd’hui un temps fort du calendrier annuel des courses.
L’association Clermont Racing, alors présidée par le pilote et garagiste clermontois Roland Charrière, organisa la course de côte nationale auto de Manson de 1980 à 1988, succédant à une première tentative, en 1979, dénommée Slalom en côte de Charade. Sur un tronçon de 2.800 à 4.000 mètres de l’ancien tracé de 8,055 km, cette compétition où les bolides partaient l’un après l’autre face au chrono intégra les camions en 1983. Elle marqua le début d’une série appelée « Grandes Heures d’Auvergne Camions » qui verra six éditions de suite. Vitesse pure, slalom attelé, maniabilité et mécanique étaient au menu et devaient attirer des professionnels régionaux utilisant ces « bahuts ».
Pour ce qui venait d’être rebaptisé « Charade Camions » en 1987, un routier bien connu de Montbrison (42), Noël Crozier, sur Renault, est le premier de cette spécialité à se faire un nom sur ce circuit. Ses trois fils, Nicolas, Vincent et Hervé, lui succèderont dans cette passion.
Les années 90 accueillent enfin les courses groupées de camions à Charade. 1990, 1997 puis 2002 leur permettent d’intégrer des meetings auto organisés par l’ASACA (Association sportive de l’Automobile Club d’Auvergne), fondatrice du circuit en 1958.Ces participations se multiplient au fil des ans, relevant alors de la Coupe de France Camions FFSA qui, en 2018, devient Championnat de France Camions FFSA sous la férule d’un promoteur, le magazine France Routes. Charade devient rapidement un des piliers majeurs de cette compétition. Autant apprécié par sa piste que son cadre verdoyant. Pour preuve, le vendredi soir des week-ends du Grand Prix Camions, le parking public accueille des camping-cars familiaux venus de toute la France. Charade tient une place importante, en tête des circuits français, dans le cœur de ces passionnés : chaque année, ils sont environ 10.000.
Les années 2010 et 2020 ont enregistré une évolution fulgurante de cet univers sportif des routiers. Des camions artistiquement décorés, d’une puissance dépassant les 1100 cv, nourris au biocarburant et dont les performances atteignent les 160 km/h, fumée garantie ! On y rencontre les marques Daf, Freightliner, Iveco, Man, Mercedes, Renault, Scania ou Volvo. Chaque rendez-vous relève du show à l’Américaine avec parade et animations autour d’une vingtaine de camions pilotés par de jeunes concurrents, hommes ou femmes appartenant à des teams très professionnels : un paddock impressionnant et animé. Les 2 & 3 septembre 2023, pour la 4e des six manches de ce championnat, Charade accueille cet impressionnant spectacle.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Dans les années 60 à 80, quand on vit à Clermont-Ferrand, il est inévitable d’avoir entendu parler du Circuit de Montagne d’Auvergne. Certains auront même envisagé d’entreprendre une activité professionnelle liée aux sports mécaniques. Patrick Depailler lui, c’est la piste ! Celle qui l’a vu rouler sur deux ou quatre roues dès 1963, l’année de ses 19 ans (il est né le 9 août 1944). Comme pour beaucoup de sa génération, le tracé mythique de 8,055 km lui permettait de meubler ses week-ends.
A se prendre pour un champion, on a envie de le devenir. Qu’à cela ne tienne ! Première course moto, le 3 juin 1963 lors du Grand Prix de France à Charade sur une Benelli dans la catégorie 50 cc Nationaux sous le nom de Patrick Lachaux : un pseudonyme afin d’échapper à l’interdit parental. Il court ensuite sous son vrai nom le 17 mai 1964 et le 29 mai 1966 sur une Bultaco 250 prêtée par Jean-Pierre Beltoise qui avait reconnu les capacités du Clermontois. Puis l’auto : le 19 juillet 1964, lors du GP de France F2, il s’aligne à la Coupe des Provinces dont il termine 2e sur une Lotus Super Seven de l’Ecurie Auvergne fondée en 1951 par Louis Rosier, l’un des pères du circuit de Charade.
Première victoire auto à Charade le 20 juin 1971 au volant d’une Alpine Renault A360 de Formule 3 devant son ami Jean-Pierre Jabouille sur une monoplace identique. En fin de saison, il devient champion de France de la catégorie. 1974 lui offre le titre de champion d’Europe de Formule 2 sur March BMW. Aux Trophées d’Auvergne 1976, Patrick gagne de nouveau à domicile sur une Simca Rallye 2 dans la course du très médiatique Simca Racing Team. Mais la Formule 1 lui tendait les bras dès 1972 au sein de l’écurie anglaise créée par Ken Tyrrell. Cette année-là, Charade accueillait son 4e et dernier Grand Prix de France. Aux côtés de Jackie Stewart et François Cevert, Patrick Depailler essaie de se faire une place chez lui. Il termine la course non classé à cinq tours (Tyrrell 004).
Six saisons en F1 chez Tyrrell seront récompensées par la victoire au GP de Monaco en 1978 (008) et une 5e place au championnat du monde puis, sur un plan technique, l’expérience inédite de conduire l’une des six roues de ce championnat (1976/77 avec la P34). L’année 1979 lui offre sa 2e victoire en F1, sur Ligier JS11, au GP d’Espagne. 1980 restera inscrit dans la vie de ce merveilleux pilote auvergnat comme la plus sombre, avec Alfa Roméo, et lors de sa disparition le 1er août au cours d’essais privés sur le circuit d’Hockenheim pour le GP d’Allemagne, le 96e Grand Prix qu’il aurait fait. Les marques françaises Alpine, Ligier et Matra lui auront aussi permis de briller en Endurance.
Depuis le début des années 2000, un bâtiment de Charade porte son nom, au pied de la tour de contrôle, ainsi qu’une rue dans le parc technologique de la Pardieu à Clermont-Ferrand. Le mini circuit de voitures radiocommandées au plateau de Gergovie (63) et une rue de Perpignan (66) portent aussi son nom et une statue lui rend hommage près de la piscine de Chamalières (63).
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Date anniversaire de l’inauguration du Circuit automobile de montagne d’Auvergne Clermont-Ferrand (devenu plus tard Circuit de Charade), le 27 juillet valorise les témoignages d’époque encore existants. En premier lieu, des photographies réalisées lors de ce premier dimanche de fête et de compétition en 1958. Une cérémonie, un ruban coupé par des autorités locales au pied d’installations temporaires (Tour de contrôle, stands, tribunes), un public important, un parking bien rempli et un programme regroupant deux courses au sein des Trophées d’Auvergne : les Trois heures internationales d’Auvergne comprenant une quarantaine de Grand Tourisme au départ. Cette épreuve aura pour vainqueur le Britannique Innes Ireland sur Lotus MK 11 #50 face aux Ferrari 250 GT dont la première entre les mains d’un flamboyant Maurice Trintignant rebaptisé Pétoulet.
Encore plus illustre, une course de Formule 2 avec vingt voitures sur la grille de départ complète le programme de cette journée inaugurale. Et la victoire, cette fois, de Maurice Trintignant qui pilotait une des nombreuses Cooper Climax présentes au départ pour assoir sa domination. Et prendre sa revanche. Le pilote clermontois Maurice Michy (père de Claude, futur pilote et organisateur d’événements) faisait partie du plateau d’engagés.
Premier record du tour du tracé de 8,055 km, celui réalisé en F2 par l’Anglais Ivor Bueb (Lotus Climax T43 #10) avec un chrono de 3’56’’6 (120,536 km/h). Chez les GT, le Français Olivier Gendebien assure un temps de 4’09’’9 (114,122 km/h) sur sa Ferrari 250 GT.
Notre photo (La Montagne) représente le départ de la course de Formule 2 avec, au premier plan, la barquette Porsche 550 RS Spyder #44 du Français Claude Storez qui semble avoir jailli de nulle part surprenant le groupe de monoplaces emmené par Ivor Bueb (#10).
Cette journée réussie avait de quoi rassurer l’Association sportive de l’Automobile Club d’Auvergne (ASACA) et son président Jean Auchatraire de tous les efforts, choix et investissements consentis pendant près de deux ans pour cette création. La légende « Charade » était en route.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Il y eut les 13 et 14 juillet 2002. Puis le 4 juillet 2021. A deux reprises, une manche française du championnat du monde de moto trial thermique a pris place dans l’enceinte du circuit de Charade. Froid dans le premier cas, légère pluie dans le second. Quelques centaines de spectateurs ont honoré chacun de ces deux rendez-vous tout au long de la douzaine de zones proposées.
Les talus du paddock, de l’épingle Marlboro et de la passerelle Michelin, le tertre de Thèdes, les sous-bois de l’Artière ou les rochers du puy de Charade surplombant la Ferme : autant de noms plus connus pour les courses sur la piste mais qui ont également servi de secteurs à franchir pour les champions de l’équilibre. Aujourd’hui, ils s’affrontent au sein du TrialGP, catégorie reine du trial moto thermique. Ils sont majoritairement anglais, espagnols ou japonais. Belges et Français suivent.
La première édition a été réalisée par Auvergne Moto Sport. La seconde par la direction du circuit. Les deux ont été supervisées par les fédérations nationale et internationale de motocyclisme (FFM/FIM) et la ligue régionale de la FFM. Des blocs rocheux venus de l’extérieur finalisent certaines zones délicates : un vrai spectacle que ces champions imaginant et « avalant » ces obstacles !
En 2002, cette 8e épreuve du championnat du monde comportait deux manches. Le champion du monde (de 1997 à 2003) anglais Dougie Lampkin (Montesa) remportait la première devant l’Espagnol Adam Raga et le Japonais Takahisa Fujinami. Ce même Japonais décrochait la seconde devant Lampkin et l’Espagnol Marc Freixa.
Dix-neuf ans plus tard, ce qui a été baptisé « Grand Prix de Charade » a enregistré la victoire de l’Espagnol Antonio (Toni) Bou sur Montesa à moteur Honda du Team Repsol. Depuis 2007, ce pilote exceptionnel revendique 16 titres de champion du monde (TrialGP) et autant de titres mondiaux en trial indoor sans parler de nombreux trophées prestigieux : le plus beau palmarès dans le domaine du trial moto. A Charade, en 2021, il précèdera l’Italien Matteo Grattarola et Adam Raga.
Lors de cette deuxième tentative d’une grande compétition de trial à Charade, les espaces verts du circuit et sa merveilleuse histoire ont séduit organisateurs, sportifs et public. Ces instants ne sont pas sans rappeler que dans les années 70/80, le circuit étant route ouverte, tous les week-ends voyaient les « exploits » de pilotes autos et motos locaux s’exprimer sur la piste. Pour leur part, les trialistes et enduristes tout-terrain se retrouvaient par plaisir sur le tertre de Thèdes. Avec de telles références et même si, en France, cette discipline moto n’attire pas toujours les foules, ces deux rendez-vous sur le toboggan auvergnat ne devraient pas rester sans lendemain.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
La notoriété repose parfois sur des contre-pieds, voire de la mésinformation. Telle une star, l’image du Circuit de Charade a servi de support à des produits divers. Malheureusement son identité a pu être détournée au profit d’objets de nature différente. Ou à celui de circuits concurrents. Petits exemples plus ou moins récents…
Au début des années 60, la marque française de jouets GéGé propose des trains et circuits automobiles électriques miniatures. Pour ces derniers, le fabricant de Montbrison (Loire) mit en avant son spécial « Rallye de Monte Carlo ». La boîte en carton comporte principalement une grande photo de départ d’une course identifiable même 60 ans après. Un départ en épis type « 24 Heures du Mans » auquel participent les 31 autos des Trois Heures d’Auvergne comptant pour le Championnat du monde des marques 1963. La piste n’est autre que celle des stands et tribunes du Circuit de montagne d’Auvergne. Dans le cadre de l’incontournable rendez-vous estival des Trophées d’Auvergne, en ce dimanche 7 juillet, cette épreuve enregistra la victoire de l’Italien Lorenzo Bandini (Ferrari Testa Rossa 3L), vainqueur au Mans trois semaines plus tôt avec Ludovico Scarfiotti.
Au premier plan de cette photo, on reconnaît la Lola MK1 Climax #20 grise de l’Anglais Chris Kerrison qui terminera 14e. Charade incarne ici l’image d’un… rallye accompli sur des routes entre Alpes et Côte d’Azur, bien loin des volcans d’Auvergne.
En 2016, le magazine Sport Auto publie un hors-série sur « La Formule 1 des années 70 ». En couverture, le départ vient d’être donné de ce que la légende désigne plus loin en double page intérieure, avec la même photo, comme le Grand Prix de Belgique 1970 à Spa-Francorchamps. Mais il s’agit de celui de France, à Charade, la même année, avec le deuxième célèbre duel opposant ici Jean-Pierre Beltoise (Matra MS120) à Jacky Ickx (Ferrari 312B). La comparaison est, certes, flatteuse mais aussi frustrante qu’involontaire. L’Autrichien Jochen Rindt l’emportera sur sa Lotus Ford 72 avant de devenir champion du monde à titre posthume car décédé en septembre à Monza.
Début 2023, à travers son #38, le trimestriel Grand Prix relate la victoire de Jackie Stewart (Tyrrell) lors du Grand Prix de France 1972 mais situe l’événement au circuit Paul Ricard ! Il s’agissait cependant de Charade qui accueillait en ce dimanche 2 juillet son quatrième et dernier GP de Formule 1 du championnat du monde des conducteurs.
Côté moto, l’encyclopédie Wikipédia, sur Internet, attribue au circuit de Rouen-les-Essarts le théâtre du Grand Prix de France moto 1966 (voir Rapport). Mais c’est bien Charade qui accueillait, ce week-end-là, cette compétition avec les deux victoires de l’Anglais Mike Hailwood (Honda) en 250 et 350cm3. Les Légendes ont la vie dure…
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Moins de bruit, mais tout autant de panache ! Alors que le passage du Tour de France cycliste 2023 (*) se précise pour la 9e étape le dimanche 9 juillet à proximité de Charade pour l’ascension du Puy de Dôme (arrivée au sommet après 35 ans d’absence !), un rappel s’impose : ce circuit mythique et le cyclisme ont tissé une belle histoire commencée le jeudi 9 juillet 1959 avec l’arrivée de la 14e étape du Tour de France (Aurillac-Clermont-Ferrand) gagnée par le Français André Le Dissez.
Premier grand champion couronné ici, le vendredi 16 août 1963, Jacques Anquetil remporte la 10e Ronde du Rasoir Philips. Cette épreuve professionnelle internationale de 205 km et 34 coureurs au départ de Vergongheon (Haute-Loire) permet de couronner sur le Circuit de Montagne d’Auvergne celui qui vient de gagner le Tour de France pour la quatrième fois. Cette course revient l’année suivante avec la victoire de Louis Rostollan.
A partir de 1965, sont organisés des contre-la-montre sur un tour (8km) pour des amateurs régionaux. Dans les années 70, plusieurs arrivées au circuit vont se réaliser. 1985 voit apparaître une petite série d’épreuves amateurs sous la férule de l’UC Sayat.
1998: que des grands ! Depuis neuf ans, la longueur du tracé de Charade est divisée par deux offrant un circuit fermé permanent. Pour sa part, devant des tribunes pleines, l’arrivée du Championnat de France professionnel sacre Laurent Jalabert, champion du monde contre-la-montre sortant (1997). Sur le podium auvergnat, il devance Luc Leblanc et Richard Virenque. Jeannie Longo s’illustre chez les femmes. François Simon l’emporte en 1999.
Entre 2016 et 2019, une épreuve propre au circuit a lieu sur la totalité du petit tracé de quatre kilomètres: l’Atria Charade Cycliste Tour. Cette organisation prometteuse créée par le Sayatois Patrick Bulidon enregistrera notamment les victoires de Laurent Brochard et Luc Leblanc.
En juillet 2021, la seule manche française de la toute jeune E-Mountain Bike World Cup Series UCI, Coupe du Monde de VTT électrique, emprunte une petite partie de la piste de Charade et quelques sous-bois pentus et appréciés de cette belle propriété de 82 hectares. Rebelote en 2022 et 2023.
Pour une grande partie de ces informations, merci à Patrick Bulidon, référence incontournable du cyclisme auvergnat. Selon ce manager d’équipe et président du comité régional de cyclisme de 1992 à 1996, « Charade peut accueillir une très belle épreuve sur deux jours maximum. Elle pourrait être associée à d’autres disciplines proches du vélo comme le VTT ou le BMX. » La boucle serait ainsi bouclée de la plus belle manière.
(*) A cette occasion, le circuit hébergera une partie de la logistique du Tour.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade (photo Richard Brunel-La Montagne)
Romorantin-Lanthenay, dans le département du Loir-et-Cher, symbolise le cœur de la douce Sologne. Mais depuis mai 2000, cette commune abrite L’Espace automobiles Matra, autrement dit le musée Matra qui, lui, existait depuis 1976 dans d’autres locaux.
Dans ses 3.000 m2 d’exposition répartis sur deux niveaux, cet antre du Bleu France de la compétition automobile présente différents modèles de Matra. A côté des incontournables véhicules sportifs ou familiaux que sont les 530, Bagheera, Murena et autre Rancho, ces lieux magiques alignent la fierté Matra en circuit, en premier lieu Formule 1 et Endurance. Pour compléter l’exposition, de nombreux posters relatent des faits d’armes concernant ces deux disciplines. Parmi ces toiles murales, une superbe photo couleurs de plusieurs mètres carrés immortalise un passage du Grand Prix de France 1969 sur le Circuit de Montagne d’Auvergne. On y reconnaît l’Ecossais Jackie Stewart sur Matra Ford MS80 devant le Néo-Zélandais Denis Hulme sur McLaren Ford M7A et les Lotus Ford de Jochen Rindt (Aut) et Graham Hill (GB) en haut de la côte « lignade » de Manson.
Pour la petite histoire, Stewart gagnera avec 57 secondes d’avance sur l’autre Matra pilotée par Jean-Pierre Beltoise, héros du jour pour son duel avec Jacky Ickx (Bel) sur Brabham Ford BT26 lequel arrive dans les roues du Français. Stewart devient champion du monde en fin de saison 1969. Le modèle présenté à Romorantin est le numéro 2, identique à celui de Stewart ce jour-là ainsi que sur la photo prise à Charade. Il côtoie un exemplaire de la Matra MS120 de 1970 (Beltoise, 13e et Henri Pescarolo, 5e au GP de France à Charade). Plus loin se tient la MS 120 D #18 identique à celle du Néo-Zélandais Chris Amon #9, 3e au GP de France toujours à Charade mais en 1972. Ce dernier, lui-aussi reconnu comme un héros par le public, bat le record du tour aux essais (2’53¨4) et celui, définitif pour le grand tracé de 8,055 km, de 2’53¨9 en course après un arrêt pour crevaison au 20e tour.
D’autres Matra, des prototypes comme la Matra BRM MS620 (BRM 2 L) ou les Matra Simca MS650 et 660 (3 L) présentes à Romorantin, rappellent quelques épopées auvergnates des voitures bleues (Trophées d’Auvergne, Tour de France automobile).
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
En 1973, la Fédération internationale de motocyclisme (FIM) crée une nouvelle formule dans le cadre de ses championnats du monde : le Trophée FIM 750 (1973-1974) devenu Championnat d’Europe 750 (1975-1976) puis Championnat du monde 750 jusqu’à son terme en 1979. Mais le Circuit de Montagne d’Auvergne avec son important public espère que le choix d’une épreuve française sur ce site confirmera le succès de l’année précédente : près de 80.000 spectateurs avaient assisté au Grand Prix de France à travers les autres catégories (125, 250, 350, 500 et side-cars). Que nenni ! Les 26 et 27 mai 1973 marqueront un tournant majeur dans l’avenir de Charade. Et catalysera le besoin de plus de sécurité sur les circuits.
Entre silences pesants, colère et huées, ce public est exposé au régime de la douche écossaise laborieusement géré par le Moto Club d’Auvergne (MCA) organisateur, la FFM et la gendarmerie. En tête d’affiche, pourtant, les 750 FIM : un plateau de toute beauté avec des bécanes inédites et de nombreuses marques (Honda, Kawasaki, Suzuki, Yamaha/350, Harley-Davidson, Ducati, Moto Guzzi, BSA, Norton, Triumph, Yamsel). Côté pilotes, du beau monde également : des vedettes du Continental Circus (Barry Sheene, John Dodds, Werner Pfirter, Gianfranco Bonera, etc.) accompagnés d’Anglais comme John Cooper ou Peter Williams fidèles de leurs « petits » circuits britanniques. Et de nombreux Français « inter » : Christian Bourgeois, Christian Léon, Eric Offenstadt ou Michel Rougerie. Parmi ces derniers, les trois premiers soulèvent la contestation dès le samedi. En cause, trop de glissières coupe-gorge indispensables aux autos. Et donc, pas assez de bottes de paille pour protéger les pilotes moto. Si la contestation s’appuie sur ce point de sécurité, la confusion et les retards se propageront tout le week-end avec menaces et sanctions des autorités. Pour cause, une semaine plus tôt, ces champions perdaient deux des leurs à Monza (Jarno Saarinen et Renzo Pasolini). Présents dans le public de Charade lors de ces deux journées insolites, nous nous souviendrons longtemps d’une ambiance crispante que la victoire et le fairplay de Barry Sheene, futur vainqueur du championnat 750 cette année-là, auront difficilement effacée. Le Riomois Michel Garnier terminera 9e et 1er Français sur une Moto Guzzi. Les autres séries inscrites (250 Inter, Trophées motocyclismes Coupe Kawasaki, Critérium sports 750, side-cars) auront souffert de cette ambiance.
Onze mois plus tôt, la piste du circuit de Charade s’était déjà « illustrée » par ses bas-côtés instables dont les projections de gravillons provoquèrent une dizaine de crevaisons lors du Grand Prix de France de Formule 1. Au 9e tour, le pilote autrichien Helmut Marko (BRM) perdait un œil, une semaine après sa victoire aux 24 Heures du Mans sur Porsche 917 K et des années avant de devenir l’une des éminences grises de Red Bull F1 et sa filière de jeunes pilotes. L’année 1974 permettra cependant au toboggan auvergnat de briller à nouveau en accueillant deux compétitions exceptionnelles : le dernier GP de France moto couru ici, devant plus de 100.000 spectateurs, avec les duels Agostini/Read et une manche du Championnat d’Europe des sport-prototypes 2 Litres agrémentée de moult batailles de marques et de pilotes. Charade au sommet de sa notoriété dérangerait-il les autres circuits français ? Certains le pensent. Mais ne peuvent éclipser un facteur sécurité devenu incontournable. En temps d’incertitude, tous les coups sont permis.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade (Texte & photo)
Notre photo : Le pilote-ingénieur anglais Peter Williams, 3e du Prix FIM 750 en 1973 à Charade, et sa belle JPS Norton préparée par ses soins.
Une légende se bâtit sur des événements, des hommes et un contexte. En autorisant les bolides et bécanes de course anciennes pour des parades sur le grand tracé de 8,055 km à l’occasion du deuxième Charade Super Show, le matin du dimanche 21 mai 2023, c’est un flot de souvenirs qui jaillit dans l’esprit de nombreux passionnés.
Entre chutes, collisions et tôle froissée, la descente de Gravenoire reste un parcours du combattant pour bon nombre de ceux qui, professionnels ou amateurs locaux, ont testé leur courage dans cet enchaînement de virages exceptionnels, souvent aveugles du Circuit de Montagne d’Auvergne. Que ce soit Chris Amon, en 1972, au volant de sa Matra MS 120D ou Giacomo Agostini, en 1974, sur sa Yamaha 500, les records du tour de l’ancien tracé (jusqu’en 1988) ont été gravés définitivement dans le marbre par de grands champions : 2’53’’9 en course (moyenne : 166,751 km/h), 2’53’’4 aux essais pour la Formule 1 du Néozélandais ! ; 3’32’’4 en course pour la moto de l’Italien (moyenne : 136,525 km/h). Quant aux anonymes auvergnats qui se « jaugeaient » le week-end ou la nuit sur cette route départementale, théâtre d’exploits des pros, les gamelles étaient plus nombreuses que les chronos ! Descente aux enfers pour circuit diabolique serait-on tenté de dire…
Sur notre cliché, deux barquettes se suivent dans les « Jumeaux » au cœur de la descente de Gravenoire. Entre falaise volcanique et ravin surplombant Royat et Clermont-Ferrand, les essais vont bon train à l’occasion des « 300 kilomètres d’Auvergne », manche du Championnat d’Europe des sport-protos 2 Litres dominé en 1973 par les Lola T292 et Chevron B21 & 23. A Charade, lors de la course du dimanche 17 juin, l’Anglais Guy Edwards l’emportera devant ses deux compatriotes Chris Craft et John Burton. Le Français Gérard Larrousse bat le record du tour pour la catégorie avec un temps de 3’07’’5 (moyenne : 154,656 km/h) sur une LolaT292.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
Ils attendent son passage depuis 2020 ! Les passionnés du Tour Auto ont rendez-vous avec lui le jeudi 20 avril au matin dans le paddock ou en bord de piste du circuit de Charade. La nuit précédente, les voitures auront stationné à la Grande Halle d’Auvergne, Clermont-Ferrand étant ville-étape de cette édition 2023 qui, du 17 au 22 avril, mène de Paris à Cannes.
Les 238 autos (1950-1982) – ou ce qu’il en restera !- arriveront par l’accueil du circuit pour attendre dans le paddock avant de prendre la piste. Un détail qui se compare avec ce qui se passait dans les années du « 8 km ». En effet, les bolides « débarquaient » par la petite route de Thèdes dont l’accès au circuit n’était qu’une formalité. Chaque concurrent se positionnait ensuite sur la grille de départ.
De nombreux faits d’armes marquent l’étape de Charade (26 fois réalisée !). On se souvient de duels ou cavaliers seuls qui ont vu s’exprimer des As du volant. En 1958, acteur du premier passage sur le « circuit de montagne d’Auvergne » de la grande histoire du Tour de France automobile, Olivier Gendebien s’illustre sur sa Ferrari 250 GT. En septembre 1970, Jean-Pierre Beltoise et Henri Pescarolo assurent le doublé sur leurs Matra MS650. En 1971, Jean-Pierre Jabouille « mettait » plus d’une minute aux deux Matra de Gérard Larrousse et Bernard Fiorentino. Il pilotait la merveilleuse Ferrari 512 M jaune de l’Escuderia Montjuich. Cette année, il est possible que l’on revoit ce proto 5L taillé pour l’Endurance (ou une réplique ?) entre les mains de Mr John of B (#251). Deux ans après, les deux Ligier JS2 aux couleurs BP dominent face aux Porsche 911 et Lancia Stratos: Gérard Larrousse gagne, Guy Chasseuil casse. Le premier récidive en 1974.
Un grand bond en avant nous conduit sur le « petit » Charade de 4 km dans les années 2000. On y retrouve un « ancien », acrobate de la piste : « Jeannot » Ragnotti avait brillé en monoplace Renault, en Proto 2Litres (March) ou en Production (R5Turbo) sur le toboggan auvergnat de la période 1975/1985. Il réapparaît à plusieurs reprises au Tour Auto (Lissac puis Optic 2000), version contemporaine de 2000 km de ce rallye exceptionnel. Dans le siège baquet de sa berlinette Alpine A110 blanche et rouge aux couleurs La Mondiale, il assurait encore le spectacle face à son ami Alain Serpaggi sur Alpine Renault 1800 jaune et à une meute de Porsche.
En 2023, les concurrents prestigieux de la catégorie Compétition ont pour noms Thierry Boutsen, ancien pilote belge de F1, sur Shelby Cobra 289 (#201) ou Henri Pescarolo (Shelby Cobra #215) face aux Ford GT40, Jaguar Type E ou Porsche 911. Pour l’anecdote, la voiture #1 (catégorie Régularité) est une Renault 4CV de 1950 pilotée par le tandem médiatique François Allain/Dominique Chapatte. Le 3e journaliste connu, Grégory Galiffi, conduira une BMW 3.0 CSL (#71).
Guy Lemaître/Agissons pour Charade (texte & photos)
69, 70, 72 : ces chiffres résument les années des trois derniers Grands Prix de France de Formule 1 ayant eu pour cadre le Circuit de montagne d’Auvergne. Autrement dit notre cher circuit de Charade. Mais ils correspondent aussi aux trois seules présences du Belge Jacky Ickx sur le tourniquet auvergnat. Voici, dans le détail, ces faits d’armes :
Jacky Ickx affiche huit victoires et 25 podiums en 114 GP de Formule 1 entre 1967 et 1979. Six victoires et trois 2es places aux 24 Heures du Mans couronnent un beau parcours en Endurance. « Monsieur le Mans » brillera par son intelligence au volant mais également grâce à sa lucidité en matière de sécurité. Pour preuve, en 1969, première participation au Mans : dernier parti ayant pris le temps d’attacher son harnais dans sa Ford GT40 pour montrer l’inconscience de ceux qui profitaient de ces fameux départs en épis pour prendre de l’avance. A l’arrivée, grâce à une aspiration calculée, il termine 1er (associé à Jackie Oliver) moins de 100 m devant la Porsche 908 d’Herrmann/Larrousse ! L’année suivante, ce type de départ, jugé à hauts risques, sera interdit définitivement. Ickx se distingue aussi en CanAm et en rallye-raid (Dakar).
2023 marque l’année du grand retour à Charade de Jacky Ickx (78 ans). Dimanche 21 mai, il sera le parrain de la 2e édition du Charade Super Show avec parades matinales exceptionnellement sur le long tracé de huit kilomètres de ses exploits.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade
8,055 km. Un numéro de code ? Non. Pas plus une distance olympique ou celle entre deux localités. Mais la longueur d’un ruban d’asphalte qui, en ce dimanche inaugural du 27 juillet 1958, fut présenté au public comme le « Circuit de montagne d’Auvergne ». Situé à un jet de pierre de Clermont-Ferrand au milieu des premiers contreforts de la Chaîne des Puys, ce qui deviendra vite le circuit de Charade (nom du village – dépendant de Royat – le plus proche de la piste) commence très tôt à se faire un nom. D’abord dans le milieu de la compétition automobile puis, rapidement, dans celui de la moto. Et, enfin, dans le cœur d’une génération de Clermontois qui, les week-ends, prennent plaisir à fréquenter cette piste devenue célèbre et ouverte à la circulation.
51 virages forment ce chapelet qui serpente à une altitude moyenne de 800 mètres. Certains s’impriment rapidement dans l’esprit des pilotes. Ils ont pour nom : après le départ et une côte de 600 m, la courbe de Manson qui prépare à la descente de Gravenoire, frissons garantis, une fois le col de Charade franchi. Arrivent au galop le Belvédère (Grand balcon), les Jumeaux, la Carrière puis l’incroyable banking à hauteur de la route de Royat… les gaz à fond. C’est ensuite le début de la remontée, Clermont et Boisséjour-Ceyrat à gauche dans le vide, les falaises volcaniques du Puy de Gravenoire à droite. Pas le temps de souffler. Champeaux donne le ton d’un final mouvementé. Le « S » de la Ferme et la descente vers le Petit Pont précèdent une courte côte et l’épingle Marlboro. Puis déboulent Thèdes, son pif-paf, sa courbe, sa descente. Enfin, le Rosier permet aux intrépides quelques prouesses ultimes et appréciées du public avant de franchir la ligne d’arrivée.
De 1959 à 1974, Charade accueille la F1 à travers quatre Grands Prix et les championnats du monde de moto avec dix Grands Prix de France ainsi qu’un Grand Prix FIM 750. Et un public énorme ! Entre ces dates, se faufilent les Trophées d’Auvergne (Prototypes, GT, formules de promotion monoplaces ou de tourisme), des courses de moto « inter » ainsi que le passage du Tour de France automobile.
Postes de secours, commissaires de piste et autres responsables du contrôle sportif, de la billetterie ou du chronométrage constituent une communauté de plusieurs dizaines d’officiels. Tous restent fidèles de ces rendez-vous orchestrés par l’Association sportive de l’Automobile club d’Auvergne (ASACA) à l’origine du circuit ou le Moto Club d’Auvergne (MCA).
1989 met un terme à cette période d’activité du grand tracé avec ses 4 passerelles. Le petit circuit fermé lui succède : 3.975 mètres, 18 virages. Dimanche matin 21 mai 2023, le « 8 km » sera exceptionnellement ouvert aux bolides à l’occasion de la deuxième édition du Charade Super Show. Parmi eux, quelques champions du passé, afin d’écrire un nouveau chapitre de cette belle histoire.
Guy Lemaître/Agissons pour Charade (texte et photo)
Il a signé ! Giacomo Agostini, le campionissimo, latin lover et gueule d’ange auteur de trois podiums lors de trois Grands Prix moto courus à Charade sera de nouveau en selle le dimanche 21 mai à l’occasion du Charade Super Show. Qui plus est, sa prestation concernera aussi bien l’ancien circuit de 8,055 km que le tracé actuel, pour des parades et démonstrations. MV Agusta 500 trois cylindres (4 temps) ou Yamaha TY (2 temps) ? Le suspense demeure. Mais retrouver Ago dans la descente de Gravenoire, dans le virage du Petit Pont ou au sein du paddock mérite de réserver cette date.
Derrière son éternel sourire charmeur, c’est avant tout un fin pilote et metteur au point. On se souvient de son dernier week-end de course à Charade en avril 1974. A l’intersaison, il venait de quitter sa fidèle marque italienne MV Agusta et le son exceptionnel de ses moteurs 4 temps pour découvrir les moteurs 2 temps du constructeur japonais Yamaha. Un geste fort quand on connaissait son attachement à la première. Une semaine avant le Grand Prix de France, il gagnait la classique américaine, les 200 Miles de Daytona, en Floride, sur sa nouvelle monture, une 750 japonaise et devant une majorité de pilotes américains très fiers. Cet exploit fut unanimement reconnu alors que beaucoup prédisaient qu’il ne s’adapterait pas à cette nouvelle motorisation. Auréolé de ce succès outre-Atlantique, il livrera deux superbes duels aux essais à l’Anglais Phil Read qui l’avait rejoint chez MV la saison précédente. Devant plus de 100.000 spectateurs, Giacomo emportera la catégorie 350 cc et cassera en 500, non sans avoir signé le record du tour moto définitif de l’ancien tracé (3’32’’4 à 136,525 km/h).
Ses passages à Charade au GP de France : 2e (MV) derrière Mike Hailwood (Honda) en 350cc en 1966 ; 4e (MV) en 350cc et 1er en 500cc en 1972 ; 1er (Yamaha) en 350cc et abandon en 500cc, en 1974. En 2018, au guidon d’une MV 500 3 cylindres, Ago est l’invité vedette du plateau moto de la première édition de Charade Heroes qui commémorait, cette année-là, le 60e anniversaire de l’inauguration du grand circuit.
Le palmarès d’Ago est inégalé. Il comporte 15 titres de champion du monde entre 1963 et 1977 (sept en 350cc et huit en 500cc) soient 123 victoires et 159 podiums en Grand Prix ; dix victoires au Tourist Trophy (GB) et d’autres à des classiques (Daytona, Imola, etc).
Guy Lemaître / Agissons pour Charade (texte et photos)
Metteur au point autant que pilote, Jean-Pierre Jabouille* s’est autant illustré par la qualité de son travail que par son attachement aux marques françaises emblématiques des années 70 et 80.
Longiligne était sa silhouette, rectiligne aura été son parcours professionnel dans le sport automobile. Jean-Pierre Jabouille faisait partie de ces pilotes auto dont la France était fière deux décennies durant. Mais celui qui a été rebaptisé « le Grand blond » a longtemps prouvé sa confiance dans la production nationale. A commencer par Renault, Alpine et Matra. Puis Peugeot et Ligier.
On retiendra en priorité ses années Formule 1. Entre 1975 et 1980, au service de Tyrrell, Renault puis Ligier, il participe à 55 Grands Prix qui se soldent par six pole positions et deux victoires (France 1979, à Dijon, où son talent est couronné par la première victoire d’un moteur turbo, qui plus est français avec Renault, en F1 ; et Autriche 1980). Cette même saison, il se blesse les deux jambes au GP du Canada. Cependant, son excellent travail technique valorise la polyvalence du pilote.
En effet, depuis ses débuts en 1966 dans la Coupe R8 Gordini, le Grand blond passera d’une discipline du sport automobile à une autre avec la même passion. Mais avec des bonheurs différents. Monoplace F3 (vice-champion de France 1968 derrière François Cevert), puis F2 (champion d’Europe en 1976 sur Alpine) ; Endurance avec 13 participations aux 24 Heures du Mans dont quatre fois 3e, notamment à travers l’épopée Matra Simca puis celle d’Alpine Renault. En 1993, il remplace Jean Todt à la tête de Peugeot Sport. On le retrouvera sur Lada au Dakar 1984 avec Michel Sardou.
Les années Charade commencent en 1966 avec une participation à la Coupe R8G lors des Trophées d’Auvergne. Puis en 1967, 1971 et 1972 sur Alpine Renault en F3. En septembre 1971, l’étape de Charade du Tour de France automobile le voit mettre plus d’une minute aux deux Matra 660 de Larrousse et Fiorentino ! Il pilote à ce moment-là la superbe Ferrari 512 M jaune (#142) de l’Escuderia Montjuich, un proto 5 Litres concurrent du Championnat du Monde d’Endurance, qui terminera 2e du Tour de France automobile avec le pilote espagnol José Juncadella.
Ce seront ensuite les deux manches (1973 et 1974) du Championnat d’Europe des prototypes 2 Litres sur Alpine Renault A440 (#14) puis A441 (#1) où la chance, ces jours-là, malgré d’excellents temps aux essais, n’était pas au rendez-vous. Le public auvergnat aura l’occasion de revoir Jean-Pierre Jabouille dans les années 1980 sur Peugeot 505 puis début des années 1990 BMW M3 lors des courses de Production et de SuperTourisme.
On notera enfin son amitié avec Jacques Laffite, son beau-frère, qui a aussi été mécanicien/R8G en 1966 et coéquipier de Jabouille chez Ligier en 1980. Ces deux Parisiens se retrouvaient régulièrement en Creuse, département voisin du Puy-de-Dôme où ils ont des attaches.
(*) Décédé le 2 févier 2023 à l’âge de 80 ans
Guy Lemaître/Agissons pour Charade (texte et photo)
Depuis sa naissance en 1958, le circuit de Charade accueille régulièrement le passage annuel du Tour de Fance automobile, épreuve internationale créée en 1899 par l’Automobile Club de France. Après une éclipse de six ans (1986-1991), cette compétition reviendra sous le nom de Tour de France automobile historique organisée par Peter Auto, avant de devenir Tour Auto. Depuis 2009, elle est devenue le Tour Auto Optic 2000. Elle associe parcours de liaison, épreuves spéciales sur route et courses en circuit.
En cette douce journée du samedi 15 septembre 1973, la 18e édition fait étape à Charade avec son lot de vedettes. En première ligne, Claude Ballot-Léna place à la corde sa Porsche 911 Carrera (Groupe 4) aux couleurs psychédéliques. A ses côtés, en tête du Tour, l’Italien Sandro Munari est prêt avec sa superbe Lancia Stratos HF (Groupe 5TA). Si, sur la grille, tous deux sont devant les deux Ligier JS2 jaunes et vertes BP, c’est Gérard Larrousse sur une de ces deux voitures françaises fabriquées en Auvergne qui gagnera la course devant Ballot-Léna. Mais, au classement final du Tour, Munari emportera l’épreuve. Cette même saison, il deviendra champion d’Europe des rallyes puis décrochera le titre mondial en 1977.
Depuis 2020, les nombreux passionnés attendent le retour du Tour! Ils pourront se régaler le jeudi 20 avril 2023 en matinée avec la présence de près de 230 voitures engagées (ayant participé entre 1951 et 1973 plus quelques modèles d’exception) parmi lesquelles les incontournables Ford GT40, Jaguar Type E, Shelby Cobra et autres Ferrari et Porsche. D’autant que la nuit précédente, Clermont-Ferrand sera la deuxième ville-étape.
En 1975, alors que beaucoup pensaient retrouver les F1 sur le circuit auvergnat, ce qui ne se reproduira plus jamais après les quatre Grand Prix qui s’y sont déroulés entre 1965 et 1972, les Trophées d’Auvergne ont occupé le week-end des 20, 21 & 22 juin. Cinq courses figuraient au programme dont celle de la Coupe nationale Renault ELF Gordini. Pour trois ans, les R5 LS kitées remplaçaient les R12 lesquelles, pendant quatre saisons, avaient succédé aux cinq années des mythiques R8.
Avant le départ, pour chaque épreuve inscrite au programme, le Directeur de course rassemblait sur la grille tous les pilotes afin de rappeler les mesures de sécurité propres au circuit et à la compétition. Ce briefing permettait au public des tribunes et alentours de voir ces champions du volant avant qu’ils ne s’expriment sur la piste.
Si elle n’est plus pratiquée aujourd’hui sous cette forme sur les circuits, cette initiative avait une certaine saveur. Elle faisait monter la pression ambiante, tant auprès des acteurs que des spectateurs. Une sorte de prologue à un scénario de film voué à la course automobile.
Pour la petite histoire, la voiture #4 au premier plan est celle du vainqueur de Charade, Jean-Luc Rancon, qui gagnera également la coupe cette année-là.
Vic Elford, monstre sacré du sport automobile décédé en ce début d’année, symbolisait l’archétype du pilote automobile polyvalent : chaque week-end, une grande partie de l’année, le champion britannique découvrait une nouvelle équipe, changeait de volant, de discipline et d’horizon.
Un jour la F1, un autre le rallye, puis les prototypes comme les Porsche 917 en Endurance, la Can-Am, le Transam ou le rallye-cross. Il était réputé pour ses qualités au volant : audace, persévérance et, surtout, adaptation à de nouveaux modèles que d’autres se refusaient de conduire. Exemple, en 1970, l’incroyable Canadian American Challenge Cup Series (Can-Am), championnat qui se déroulait sur une dizaine de circuits d’Amérique du Nord. On y rencontrait des voitures de course innovantes et surpuissantes et un règlement qui se résumait à une philosophie : sans limites ! Vic s’y est illustré à travers trois marques entre 1970 et 1974 : McLaren, Chaparral (l’incroyable 2J à effet de sol et turbine) et Shadow. L’histoire retiendra également qu’Elford aura fait découvrir les qualités de la Porsche 911 en gagnant le rallye de Monte-Carlo en 1968.
Sa réalisation aura duré 15 mois. Mais deux années ont été nécessaires pour que tractations, démarches administratives et travaux donnent naissance au circuit de montagne d’Auvergne. Le dimanche 27 juillet 1958, son inauguration couronne l’amitié et la complémentarité de deux Auvergnats passionnés d’automobile : Jean Auchatraire (Automobile Club d’Auvergne) et le pilote Louis Rosier. Le second disparaît malheureusement en 1956, non sans avoir laissé son empreinte ce qui permet au premier d’aller jusqu’au bout de leur rêve commun. Un Champenois, Raymond Roche (circuit de Reims), apporte une expertise précieuse à cette naissance. La piste toute neuve de huit kilomètres serpente sur les hauteurs de Clermont-Ferrand, accusant un important dénivelé. Charade, qui ne portait pas encore officiellement ce nom, entrait ainsi dans la cour des plus sélectifs circuits de montagne. Deux courses au programme: les Grand Tourisme (GT) à l’occasion des Trois heures d’Auvergne (40 voitures sur la grille pour un départ type Le Mans ! ) et les Formule 2. Elles auront respectivement pour vainqueurs Innes Ireland (GB) sur Lotus MK11, et le Français Maurice Trintignant sur Cooper Climax. Gerbes aux vainqueurs et concert de louanges pour tous.
La Légende était sur orbite. Guy Lemaître / Agissons pour Charade